En Tunisie, plusieurs partis appellent au boycott du référendum constitutionnel voulu par le président Saïed

En Tunisie, plusieurs partis appellent au boycott du référendum constitutionnel voulu par le président Saïed

Le mouvement islamo-conservateur Ennahda dénonce un projet de Loi fondamentale qui « légitime la construction d’un régime autoritaire et tyrannique ».

Le parti d’inspiration islamiste tunisien Ennahda a appelé ses partisans, jeudi 7 juillet, à boycotter le vote du 25 juillet sur un référendum qui amende fortement la Constitution, dénonçant « la construction d’un régime autoritaire ».

« Nous appelons au boycott du référendum », qui « n’est pas dans l’intérêt des Tunisiens », a déclaré le porte-parole du mouvement, Imed Khemeri, lors d’une conférence de presse à Tunis. A ses yeux, le projet de réforme de la Constitution « légitime la construction d’un régime autoritaire et tyrannique ». Il dénonce aussi un document « fait sur mesure », qui « ne provient pas du peuple ni n’est le fruit d’une concertation nationale ».

Le président Kaïs Saïed, qui s’est arrogé depuis un an les pleins pouvoirs en Tunisie, a présenté début juillet un projet de Constitution qui instaure un régime présidentiel et accorde de larges pouvoirs au chef d’Etat, sans véritables garde-fous. Le projet marque une rupture radicale avec le système plutôt parlementaire en place depuis 2014, source de conflits récurrents entre les branches exécutive et législative.

Le projet de Constitution a été désavoué immédiatement par le juriste Sadok Belaïd, qui avait été chargé par le président de le rédiger. M. Belaïd s’est dissocié de la mouture présentée par M. Saïed, critiquant un texte pouvant « ouvrir la voie à un régime dictatorial ». Mardi, le président Saïed, juriste de formation, a défendu ses amendements à la Constitution, estimant qu’ils reflètent « ce que le peuple tunisien a exprimé depuis la révolution [de 2011] jusqu’au 25 juillet 2021, lorsqu’elle a été remise sur le droit chemin ».

Un texte « écrit par une seule personne »

Le parti islamo-conservateur Ennahda conserve un poids électoral important, avec environ 9 % des intentions de vote en cas d’élections législatives. Depuis la chute du dictateur Ben Ali en 2011 et l’avènement de la démocratie en Tunisie, le mouvement a gouverné le pays pratiquement sans interruption.

Le Front de salut national, qui, mis à part Ennahda, regroupe de petites formations politiques et des associations, avait déjà appelé au boycott du référendum en début de semaine, tout comme une trentaine d’ONG, dont le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) et la Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH), qui dénoncent un texte « écrit par une seule personne, sans participation de la société civile ni d’experts ».

Jeudi en fin d’après-midi, environ 200 militants du Parti destourien libre (PDL), d’Abir Moussi, ont manifesté contre le projet de nouvelle Constitution, appelant à « arrêter le processus référendaire illégal ». « Nous n’avons pas confiance dans vos résultats », ont clamé les militants du PDL, mouvement nostalgique du héros de l’indépendance, Habib Bourguiba, accusant le président Saïed de vouloir paver la voie à un retour au pouvoir de partis pro-islamistes.