Algérie-France : quelles seront leurs relations lors du second mandat de Macron ?

Algérie-France : quelles seront leurs relations lors du second mandat de Macron ?

Au lendemain de la réélection du président français, son homologue algérien lui a adressé un message de félicitations et l’a assuré de sa volonté de refonder les rapports entre les deux pays. Visite à Alger, question mémorielle, immigration clandestine… Quels dossiers attendent le chef de l’État français ?

S’il faut en croire le message de félicitations adressé par Abdelmadjid Tebboune à Emmanuel Macron au lendemain de la réélection de ce dernier pour un second mandat, le 25 avril, les relations algéro-françaises sont au beau fixe.

« Qu’il s’agisse de mémoire, de relations humaines, de consultations politiques ou de projections stratégiques, de coopération économique et d’interactions dans toutes les sphères de travail en commun, la vision rénovée, pleinement respectueuse des souverainetés et de l’équilibre des intérêts, que nous partageons, a le potentiel d’ouvrir à nos deux pays de vastes horizons d’amitié, de convivialité harmonieuse et de complémentarité mutuellement avantageuses », écrit ainsi Abdelmadjid Tebboune.

Un texte accompagné d’une invitation à se rendre « prochainement » en Algérie, où Macron est déjà allé en décembre 2017, lorsque Bouteflika était au pouvoir.

Réconciliation

Si l’Élysée n’a pas encore répondu à cette invitation et s’il est peu probable que le déplacement en question intervienne dans un proche avenir, le message – un peu plus chaleureux que les félicitations d’usage – est plutôt favorablement accueilli à Paris.

En attendant une éventuelle visite, cette refondation passe par la remise à plat de certains dossiers sensibles qui pèsent toujours lourdement sur ces relations. Celui de la mémoire et de l’histoire coloniale en est un.

« Le président Macron va continuer à faire des gestes forts pour apaiser davantage cette mémoire », confie un familier de la diplomatie française. « Il est prévu un grand geste de restitution d’objets prochainement », glisse mystérieusement l’un des amis d’Emmanuel Macron.

La commémoration du 60e anniversaire de la guerre d’indépendance pourrait-elle être l’occasion de nouveaux gestes ?

Au cours de son premier mandat, le chef de l’État avait pris plusieurs initiatives : restitution des ossements de 24 résistants algériens tués au XIXe siècle, reconnaissance de la responsabilité de l’armée française dans la mort du mathématicien communiste Maurice Audin et de l’avocat nationaliste Ali Boumendjel durant la bataille d’Alger en 1957 et ouverture des archives de la guerre d’Algérie.

La commémoration, en juillet 2022, du 60e anniversaire de la guerre d’indépendance pourrait-elle être l’occasion de nouveaux gestes ? À voir. Mais cette politique hexagonale des petits pas mémoriaux n’est pour l’heure pas suivie de réciprocité de la part des Algériens.

Si l’historien Benjamin Stora a déjà rendu, en janvier 2021, son rapport sur la mémoire et la colonisation, son confrère algérien Abdelmadjid Chikhi, chargé des archives et des mémoires, est aux abonnés absents. Là encore, il y a du travail à faire côté algérien.

L’autre dossier d’une extrême sensibilité est celui de la coopération en matière de lutte contre l’immigration clandestine et de délivrance de visas, à l’origine de la brouille de 2021 et du rappel de l’ambassadeur d’Algérie en France en octobre, avant son retour en poste en décembre.

Représailles

Le manque de coopération d’Alger dans l’application des obligations de quitter le territoire français (OQTF) et dans la délivrance des laisser-passer consulaires permettant à ses ressortissants en situation irrégulière ou ayant fait l’objet d’une expulsion a aussi provoqué la colère de l’Élysée et du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin.

Les autorités algériennes n’ont pas été franchement coopératives sur le dossier migratoire

Ce dernier a été accusé par le président algérien d’avoir proféré un « gros mensonge » en dénombrant, en octobre 2021, « 7­ 000 ressortissants » algériens situés en France qu’il fallait reconduire à la frontière.

« Les autorités algériennes n’ont pas été franchement coopératives sur ce dossier en prétextant plusieurs raisons et impératifs liés à la crise sanitaire et à la fermeture des frontières mais qui ne nous semblent pas tout à fait pertinents », déplore une source diplomatique à Paris.

Résultat ? En guise de représailles, le gouvernement français annonce en septembre la réduction de 50 % du nombre de visas accordés aux ressortissants algériens. Ce rabotage drastique ne touche pas les étudiants et les hommes d’affaires mais plutôt les responsables politiques.

« On va plutôt ennuyer les gens qui sont dans le milieu dirigeant, qui avaient l’habitude d’obtenir des visas facilement », expliquait Macron lors d’un échange avec dix-huit jeunes gens issus de familles ayant vécu intimement la guerre d’Algérie, selon le quotidien français Le Monde du 2 octobre.

Près de dix mois après la colère de Paris en réaction à ce manque de coopération, ce dossier n’a pas connu d’évolution significative. Selon les données fournies en janvier 2022 par le ministère français de l’Intérieur, 63 649 visas ont été délivrés par les consulats français en Algérie durant l’année 2021. Soit une baisse de 13,1 % par rapport à l’année précédente. Des sources proches de ce dossier précisent que les années 2020 et 2021 présentent un motif particulier en matière de délivrance de visas en raison de la pandémie et de la fermeture des frontières. Toutefois, un effort a été consenti en direction des étudiants pour préserver cette catégorie des effets de la crise.