L’Espagne prend le relais de l’Algérie pour approvisionner le Maroc en gaz

L’Espagne prend le relais de l’Algérie pour approvisionner le Maroc en gaz

Cet accord entre Madrid et Rabat survient après qu’Alger a décidé de ne pas renouveler le contrat du Gazoduc Maghreb Europe, sur fond de vives tensions diplomatiques.

Le gouvernement espagnol a annoncé, jeudi 3 février, qu’il allait aider le Maroc à « garantir sa sécurité énergétique » en lui permettant d’acheminer du gaz à travers le Gazoduc Maghreb Europe (GME), que l’Algérie n’alimente plus depuis fin octobre.

« Le Maroc a demandé un soutien pour garantir sa sécurité énergétique sur la base de [nos] relations commerciales, et l’Espagne y a répondu favorablement, comme elle l’aurait fait pour tout partenaire ou tout voisin », a indiqué le ministère espagnol de la transition écologique dans un communiqué. « Le Maroc pourra acquérir du gaz naturel liquéfié (GNL) sur les marchés internationaux, le faire livrer dans une usine de regazéification de l’Espagne péninsulaire et utiliser le gazoduc du Maghreb (GME) pour l’acheminer vers son territoire », a ajouté le ministère, sans donner plus de précisions sur le calendrier ou les volumes de gaz concernés.

Sollicité, le ministère marocain de l’énergie n’a pas voulu fournir de détails, notamment financiers, sur cet accord. Selon le site marocain Le360, le Maroc était en pourparlers avec l’Espagne depuis plusieurs semaines pour utiliser les terminaux GNL des ports espagnols afin d’acheminer du gaz vers le Maroc via le GME.

Cet accord entre Madrid et Rabat survient alors que l’Algérie a décidé fin octobre de ne pas renouveler le contrat du GME, qui desservait l’Espagne via le Maroc, sur fond de vives tensions diplomatiques avec son voisin. Les deux pays maghrébins s’opposent en particulier sur le dossier épineux du Sahara occidental, vaste territoire désertique contrôlé à 80 % par Rabat, mais revendiqué par les indépendantistes du Front Polisario, soutenus par Alger. Ces tensions ont conduit l’Algérie à rompre ses relations diplomatiques avec le Maroc fin août.

Un projet de terminal de GNL à Mohammedia

La décision d’Alger de fermer le robinet du GME a privé Rabat de gaz algérien, alors que, selon les experts, le Maroc couvrait 97 % de ses besoins en prélevant directement du gaz transitant sur son territoire, comme droit de passage, et en l’achetant à un tarif préférentiel au géant algérien Sonatrach.

En aidant le Maroc à se fournir en gaz, Madrid fait un geste envers Rabat au moment où leurs relations bilatérales sont tendues depuis l’accueil par l’Espagne, en avril 2021, du chef du Front Polisario pour s’y faire soigner. La crise diplomatique majeure déclenchée avait eu pour point culminant l’arrivée, mi-mai, de près de 10 000 migrants dans l’enclave espagnole de Ceuta, à la faveur d’un relâchement des contrôles par les autorités marocaines.

Rabat a par ailleurs signé fin novembre un accord avec Sound Energy pour que cette société britannique lui fournisse du gaz provenant d’un gisement qu’elle exploite à Tendrara, dans l’est du Maroc. Aux termes de ce contrat, Sound Energy s’engage à produire et à livrer à l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (Onee) jusqu’à 350 millions de mètres cubes de GNL par an, pendant dix ans. Ce gaz transitera par la partie marocaine du GME.

Les médias marocains ont par ailleurs fait état du projet de construction d’un terminal de GNL dans le port de Mohammedia, près de Casablanca. L’Espagne continue pour sa part d’être approvisionnée en gaz par l’Algérie, son premier fournisseur, via le gazoduc sous-marin Medgaz, qui relie directement les deux pays et dont la capacité va être augmentée pour compenser l’arrêt du transit via le GME.