Burkina Faso : des militaires annoncent « suspendre » la Constitution du pays

Dans une déclaration à la télévision publique, les putschistes ont dissous l’Assemblée nationale et le gouvernement, et assuré que l’ordre constitutionnel serait rétabli ultérieurement.

Des militaires en uniforme ont annoncé lundi 24 janvier à la télévision publique avoir pris le pouvoir au Burkina Faso et chassé le président Roch Marc Christian Kaboré, plongeant dans une nouvelle crise ce pays sahélien. Le Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR) « qui regroupe toutes les composantes des forces de défense et de sécurité, a ainsi décidé de mettre fin au pouvoir de M. Roch Marc Christian Kaboré ce 24 janvier 2022 », a annoncé le capitaine Kader Ouedraogo, entouré d’une quinzaine de militaires à la télévision.

Conséquence de ce coup de force initié dimanche 23 janvier par des mutineries dans des casernes du pays, les frontières terrestres et aériennes seront fermées à partir de minuit, le gouvernement et l’Assemblée nationale dissous et la Constitution « suspendue ».

Un couvre-feu est instauré de 21 heures à 5 heures sur tout le territoire, a poursuivi Kader Ouedraogo, lisant un communiqué signé du leader du MPSR, le lieutenant-colonel Paul-Henri Damiba, commandant de la 3e région militaire, le nouvel homme fort du pays. Le MPSR s’est engagé « à proposer dans un délai raisonnable (…) un calendrier de retour à un ordre constitutionnel accepté de tous ».

Où se trouve le président Kaboré ?

Il « appelle les patriotes, les Africains intègres et tous les amis du Burkina Faso à le soutenir et l’accompagner dans ce tournant décisif de l’histoire de notre pays ». Avant le début du couvre-feu, des centaines d’habitants de Ouagadougou sont descendus dans les rues de la capitale pour célébrer cette prise de pouvoir par des cris de joie et des coups de sifflet.

Une question demeure : où se trouve Roch Marc Christian Kaboré, qui présidait depuis 2015 le pays ? Sur le compte Twitter de l’ancien président, la télévision publique RTB a publié une lettre manuscrite signée de sa main dans laquelle il indique « déposer sa démission », « dans l’intérêt supérieur de la nation, suite aux événements qui s’y déroulent ».

Les militaires se sont contentés d’indiquer que « les opérations se sont déroulées sans effusion de sang et sans aucune violence physique sur les personnes arrêtées qui sont détenues dans un lieu sûr dans le respect de leur dignité », sans mentionner de noms.

Lundi matin, un journaliste de l’AFP a vu près de la résidence du chef de l’État trois véhicules criblés de balles. Des traces de sang étaient visibles sur l’un d’eux. Des tirs avaient été entendus dimanche soir près de la résidence du chef de l’État et un hélicoptère avait survolé la zone tous feux éteints, selon des résidents.

Population excédée

Au pouvoir depuis 2015, le président Kaboré, réélu en 2020 sur la promesse de faire de la lutte antidjihadiste sa priorité, était de plus en plus contesté par une population excédée par les violences djihadistes et son impuissance à y faire face.

Sur la scène internationale, ce coup de force a été largement condamné, notamment par l’ONU qui a appelé les auteurs « à déposer les armes » et à protéger « l’intégrité physique » du président Kaboré. Les États-Unis et l’Union européenne ont eux demandé la « libération immédiate » de Roch Marc Kaboré, la France appelant ses ressortissants à la prudence et à éviter tout déplacement au Burkina.