Ethiopie : trois employés de Médecins sans frontières tués dans une attaque au Tigré

La branche espagnole de MSF a dénoncé, vendredi, « l’assassinat brutal », dans cette région en guerre, d’une coordinatrice de nationalité espagnole et de deux Ethiopiens, un assistant de coordination et un chauffeur pour l’ONG.

Trois employés de Médecins sans frontières (MSF), une Espagnole et deux Ethiopiens, ont été tués dans une attaque dans la région en guerre du Tigré éthiopien, a annoncé, vendredi 25 juin, la branche espagnole de MSF.

« Nous avons perdu le contact avec eux et la voiture dans laquelle ils voyageaient hier dans l’après-midi, et ce matin le véhicule a été retrouvé vide et leurs corps sans vie à quelques mètres », a indiqué l’organisation non gouvernementale (ONG) dans un communiqué en dénonçant « un assassinat brutal ».

Maria Hernandez, de nationalité espagnole et âgée de 35 ans, était l’une des coordinatrices d’urgence de MSF au Tigré. Yohannes Halefom Reda et Tedros Gebremariam Gebremichael, tous deux Ethiopiens et âgés de 31 ans, étaient assistant de coordination et chauffeur pour l’ONG. « Maria, Yohaness et Tedros étaient là-bas pour aider la population et il est impensable qu’ils aient payé de leurs vies pour cela », a poursuivi l’ONG, sans communiquer plus de détails.

Le ministère des affaires étrangères éthiopien a affirmé, vendredi soir sur Twitter, que les trois humanitaires sont morts dans la localité d’Abi Adi, à une cinquantaine de kilomètres à l’ouest de la capitale régionale, Mekele. Il ajoute que le TPLF, le Front populaire de libération du Tigré, « opère activement » dans cette zone.
Une enquête indépendante réclamée

Le secrétaire général adjoint par intérim de l’ONU pour les affaires humanitaires, Ramesh Rajasingham, a qualifié ces meurtres de « scandaleux et désolants ». « Les autorités doivent désormais enquêter rapidement » sur ces meurtres qui sont des « violations graves du droit international humanitaire », a-t-il ajouté dans un communiqué à New York.

A Bruxelles, le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a « condamné de la manière la plus forte » cette « atrocité » qui est « un nouvel exemple horrible de l’escalade du conflit au Tigré et une violation flagrante des lois humanitaires internationales », selon un communiqué.

De leur côté, les Etats-Unis, se disant « consternés et profondément attristés » par les homicides des employés de MSF, ont demandé une enquête indépendante permettant de traduire en justice les auteurs de l’attaque.

« Au final les autorités éthiopiennes ont l’entière responsabilité d’assurer la sécurité des travailleurs humanitaires ainsi qu’un accès libre et sans entraves à l’aide humanitaire », a souligné le porte-parole du département d’Etat dans un communiqué.

Nombreuses exactions sur les civils

L’armée fédérale éthiopienne a lancé en novembre 2020 une opération militaire visant à renverser les autorités locales dissidentes et issues du TPLF. Ce conflit, qu’Addis-Abeba voulait bref, se poursuit, marqué par de nombreux récits d’exactions sur les civils (massacres, viols, déplacements de population…). Des troupes venues de l’Erythrée voisine pour combattre aux côtés de l’armée éthiopienne, et toujours présentes, sont soupçonnées d’actes répréhensibles.

Ces derniers jours, habitants, responsables locaux et diplomates ont relaté un regain d’activité militaire, notamment autour des villes stratégiques d’Adigrat et Wukro. Mardi, au moins 64 personnes ont été tuées et 180 autres blessées sur un marché de la localité de Togoga, au nord-ouest de Mekele. L’armée a affirmé que cette « opération », menée au lendemain d’élections législatives et régionales, visait des combattants rebelles.

Le bombardement a été condamné mercredi par l’Union européenne et les Etats-Unis, ainsi que par l’ONU, qui a demandé une « enquête rapide sur cette attaque et les actes ultérieurs privant les victimes de soins médicaux ». Vendredi soir, le patron de l’OMS, l’Ethiopien Tedros Adhanom Ghebreyesus, originaire du Tigré, a dénoncé l’attaque, accusant les autorités d’avoir « tué et blessé des civils » et d’avoir « empêché les ambulances d’accéder aux lieux et d’évacuer les blessés ».

« Les attaques contre des civils, où que ce soit, sont totalement inacceptables, tout comme empêcher l’accès à des soins immédiats, parce que nous perdons des vies », a déclaré le Dr Tedros, lors d’un point de presse régulier de l’OMS, qui fournit du matériel médical à un hôpital sur place.