MENACE. Pour le président sénégalais, son pays et d’autres d’Afrique de l’Ouest devraient se préparer à affronter une poussée djihadiste et exclure tout dialogue.
« Que ce soit le Sénégal ou les autres pays côtiers, qui sont le dernier rempart, il faut qu’on se prépare à rentrer dans la bataille », a alerté le président sénégalais Macky Sall dans un récent entretien accordé à Radio France Internationale. Voilà pourquoi : le renseignement français a récemment diffusé la vidéo d’une réunion entre les chefs d’Al-Qaïda au Sahel, prévenant contre « leur projet d’expansion vers les pays du golfe de Guinée ». Une menace connue de longue date des pays de la région. En juin 2020, un poste de contrôle du nord de la Côte d’Ivoire, frontalier du Burkina Faso, a été visé par une attaque similaire aux actions djihadistes sahéliennes : 14 soldats ont été tués.
La menace s’amplifie jusqu’au Sénégal
Face à des ennemis qui ne désarment pas, Macky Sall prône une attitude vigoureuse, avec un refus de dialoguer avec eux et un renforcement du mandat de la mission de l’ONU au Mali. Le Sénégal, volontiers considéré comme un îlot de stabilité, suit de longue date avec la plus grande attention la situation à ses frontières avec la Mauritanie au nord et le Mali à l’est, épicentre des violences djihadistes qui se propagent à travers le Sahel. Illustration : la justice sénégalaise a inculpé et écroué en février quatre hommes arrêtés dans une ville frontalière du Mali et présentés par la presse comme membres d’une cellule de soutien à un des principaux groupes djihadistes du prédicateur malien Amadou Koufa, opérant au Mali, affilié à Al-Qaïda. Autre fait important, le côté malien de la frontière commune a été pour la première fois le théâtre d’attaques djihadistes en 2020. Enfin, un rapport publié le 3 février par le Conseil de sécurité de l’ONU souligne que « des éléments du GSIM, soutenus par des influenceurs islamistes radicaux, se sont implantés au Sénégal », notamment sur l’axe Bamako-Dakar et dans l’est du pays. Interrogé sur sa crainte d’une contagion, le président Sall, s’exprimant pour la première fois publiquement sur cette cellule, a répondu : « Oui, nécessairement. » « Leur objectif, c’est d’atteindre l’océan Atlantique », a-t-il ajouté.
Pas de dialogue avec les djihadistes
Mais là où le président sénégalais marque sa différence, c’est sur la question de l’épineux dialogue avec les djihadistes. Alors que les nouvelles autorités maliennes persistent dans le projet de dialoguer avec certains djihadistes, que le débat a cours aussi chez le voisin burkinabè et qu’au contraire le président français Emmanuel Macron vient d’affirmer la volonté de « décapiter » les organisations affiliées à Al-Qaïda au Sahel, le président Macky Sall dit être « contre une discussion avec les terroristes ».
Le Sénégal est aussi l’un des principaux contributeurs en personnel à la mission de l’ONU au Mali (Minusma). Macky Sall préconise, comme d’autres dirigeants africains, que la Minusma, pour une mission plus offensive, soit placée sous le chapitre 7 de la charte des Nations unies, qui permet le recours à la force en cas de menace contre la paix ou d’acte d’agression. « Vous maintenez la paix quand il y a une paix à maintenir; quand vous faites face à des djihadistes, à des terroristes, il n’y a pas de paix à maintenir, il faut lutter contre », dit-il.