Islam radical: et si la solution passait par l’apostasie des musulmans?

Emmanuel Macron parle de “crise de l’islam”. C’est la moindre des choses!

La décapitation de Samuel Paty, par un terroriste islamiste, pour avoir enseigné la liberté d’expression à ses élèves lors d’un cours d’histoire avait horrifié la France. Les assassinats qui se succèdent depuis, en France ou en Europe, menacent au contraire de banaliser la terreur. L’objectif de ces crimes est limpide : perpétuer le projet impérial d’une religion qui veut liquider nos principes civilisationnels.

Faut-il y voir la preuve de la “crise de l’islam” qu’Emmanuel Macron soulignait ? Le constat du chef de l’État avait interpellé les musulmans du monde entier, y compris ceux de bonne foi. Ne doivent-ils pas se rendre à l’évidence ? Comment justifier autrement que la critique de l’islam expose ceux qui s’y adonnent à autant de risques ? Comment expliquer, à l’heure de la société de l’information, que les pays musulmans soient, en matière de libertés civiles, aux antipodes de ce que nous sommes en droit d’attendre des nations civilisées ?

Hypocrisie

Comme si cela ne suffisait pas, la plupart de ces pays sont plus prompts à s’indigner de la défense de la liberté d’expression par Emmanuel Macron en appelant au boycott des produits français qu’à dénoncer les oppressions commises au nom de leur religion. Autre fait notable, leur agressivité envers de simples caricaturistes contraste avec leur silence assourdissant sur le génocide des Ouïgours que la dictature chinoise est en train de perpétrer. Cette hypocrisie montre que la prétendue liberté de croyance dont se prévalent ces pays n’est qu’un alibi pour justifier la guerre de civilisation qu’ils mènent contre une Europe qui, à l’inverse de l’Empire du Milieu, apparaît comme une proie facile.

Le parallèle entretenu avec le christianisme pour évacuer la particularité de l’islam relève d’une lâcheté dont il convient de se départir 

Parler de “crise de l’islam” est donc la moindre des choses. Encore qu’on peut se demander si ce vocabulaire n’est pas trop indulgent. Il laisse entendre que l’islam n’est pas en soi coupable des crimes dont on l’accuse. Ces crimes ne seraient que le résultat de son “détournement”, pour employer le mot utilisé par Emmanuel Macron lors de son entretien à Al Jazeera. Il suffirait de restaurer l’âge d’or d’un islam qui cultivait jadis le pluralisme pour lutter contre le terrorisme. Cet optimisme inspire le projet d’un islam des Lumières dans lequel tant de gens placent leur espérance. Trois siècles avant nous, un éminent penseur émettait pourtant quelques doutes vis-à-vis de ce récit angélique.

L’avertissement de Montesquieu

Dans l’Esprit des Lois, Montesquieu écrivait que « la religion mahométane, qui ne parle que de glaive, agit encore sur les hommes avec cet esprit destructeur qui l’a fondée ». Les débats sur la nature impériale, politique et juridique de l’islam ne datent pas d’aujourd’hui. Non sans sévérité, le philosophe des Lumières identifiait le despotisme comme un trait consubstantiel à la religion musulmane.

N’est-ce pas ce que reconnaissent du bout des lèvres les critiques de l’islam radical ? Le dictionnaire de l’Académie française définit en effet la radicalité comme la volonté de retrouver l’essence de quelque chose. On ne peut, en toute cohérence, craindre l’essence d’une doctrine tout en cultivant l’espoir de sa réforme. Les radicaux posent problème dans la mesure où les racines de leurs croyances sont problématiques.

Le parallèle entretenu avec le christianisme pour évacuer la particularité de l’islam relève d’une lâcheté dont il convient de se départir. Que des crimes abominables aient été commis au nom du christianisme est exact. Mais il est difficile de déduire le massacre de la Saint-Barthélemy du sermon sur la montagne. Si l’on se souvient que l’essence de la doctrine chrétienne réside moins dans les récits bibliques que dans les enseignements du Christ (qui est la seule incarnation du “verbe divin” pour les authentiques chrétiens), nous devons admettre que les sermons d’un Juif qui invite ses semblables à tendre la joue gauche quand on leur frappe la joue droite ne posent pas les mêmes risques sécuritaires auxquels nous sommes aujourd’hui confrontés. On peut même se demander s’ils ne sont pas à l’origine de cette complaisance mortifère qui conduit tant d’intellectuels européens à excuser les attentats islamistes commis sur leur sol pour y voir la conséquence des errements occidentaux.

L’islam est pacifique dans la proportion où il est moins… islamique

Prenons un exemple plus laïque. La vile colonisation a pu être justifiée au nom de l’universalisme républicain. Il serait pourtant ridicule d’attribuer l’impérialisme français à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Les mouvements anti-impérialistes, eux-mêmes, dénonçaient ces conquêtes comme le fruit d’une application étriquée des préceptes de la Révolution française. C’est l’inconsistance des Européens avec leurs principes qui les ont conduits à dominer une partie du monde pendant qu’ils proclamaient la liberté chez eux. C’est d’ailleurs parce qu’ils ne pouvaient méconnaître l’injustice de leurs actes que l’historiographie postcoloniale est si sévère avec cet héritage criminel.

Toutes les idéologies peuvent inspirer des méfaits. Mais alors que certains crimes découlent d’une mauvaise lecture desdites idéologies, d’autres sont le fruit de leur application cohérente. Les attentats islamistes se rangent hélas dans la seconde catégorie. Ils puisent leur inspiration dans un texte incréé ; qui contient le verbatim de Dieu ; proclame que tout homme naît musulman avant de trahir éventuellement sa condition ; commande de tuer tous les mécréants ; et prend pour modèle un prophète qui était aussi un chef politique et militaire ayant commis toutes sortes d’exactions propres à la fonction. Ces traits essentiels expliquent que les contrées islamiques demeurent gouvernées par des institutions despotiques au XXIe siècle.

Entendons-nous bien. Personne ne dit que tous les musulmans revendiqués sont des terroristes. En France, la majorité d’entre eux sont pacifiques. Nous devons toutefois constater que l’islam est pacifique dans la proportion où il est moins islamique. En France, si la paix demeure dans le cœur de la majorité des musulmans revendiqués, c’est en dépit de leur religion et non grâce à elle.

Beaucoup sont tentés de nier ce constat pour ne pas braquer les musulmans modérés. Lors de son entretien à Al Jazeera, Emmanuel Macron a condamné les appels à la violence en provenance des musulmans au nom même de leur foi : “je n’ai pas compris que l’islam légitimait ou soutenait quelque violence que soit”. Feindre le caractère paisible de l’islam est une stratégie à double tranchant. D’un côté, elle peut rallier les musulmans modérés à une lecture plus libérale de leur religion. De l’autre, elle permet à l’islam de se soustraire aux critiques qui lui sont adressées pour continuer à se diffuser, pour le plus grand bonheur des radicaux convaincus que leur interprétation est destinée à triompher.

Dissidence

Le caractère bancal de cette stratégie pose la question de savoir si l’apostasie des musulmans n’est pas la meilleure voie pour les acculturer aux sociétés ouvertes. Cette démarche supposerait l’engagement de militants érudits, d’artistes passionnés, de rhéteurs motivés au service de l’ambition suivante : en appeler à la sensibilité de leurs semblables de confession musulmane pour les persuader d’adhérer à des croyances plus paisibles.

D’aucuns soutiendront l’impossibilité de ce scénario. Les relativistes feront valoir que l’homme enraciné est imperméable aux apports de la raison et des civilisations extérieures. Ces propos étaient déjà tenus par les adversaires des Lumières au 18e siècle, à l’instar d’un Gottfried von Herder. La géopolitique infirme ce pessimisme. De la Tunisie à l’Iran, le monde musulman produit lui-même ses dissidents qui attendent d’être soutenus par un Occident qui surmonte ses complexes postcoloniaux, assume ses valeurs, et se tient prêt à mener la guerre froide entre l’universalisme libéral et l’impérialisme islamiste à l’issue de laquelle il ne peut y avoir qu’un seul vainqueur.