Guinée : paralysie des activités à l’intérieur du pays

Les populations en dehors de Conakry subissent aussi les revers de la crise postélectorale. Le calme est revenu par endroits, la tension reste palpable.

À Mamou, ville favorable à l’opposant Cellou Dalein Diallo, le calme est revenu après cinq jours de manifestations ayant causé des morts, nous indique Badiko Diallo, journaliste au sein de Bolivar Fm, notre radio partenaire. Il ajoute cependant que les activités sont encore paralysées dans cette ville carrefour :

« Certains viennent observer ce qu’il s’est passé et voir un peu les traces de ces violences dans la ville. Les marchés sont toujours fermés, les banques aussi. Les sociétés de téléphonie sont fermées jusqu’à maintenant. Cette psychose est là, elle est toujours là, palpable. Ils (partisans de Cellou Dalein Diallo) sont à l’écoute de leur leader qui a appelé à la résistance.

L’armée qui dispose d’un camp à Mamou s’est retirée des principales artères. La police et la gendarmerie sont présentes dans les quartiers périphériques, favorables à l’opposition.

Coupés du monde

A 400 kilomètres de Mamou, la paralysie des activités se fait aussi ressentir au niveau des populations de la ville de Kankan. La ville est réputée proche du président Alpha Condé. Sylla, habitant de cette ville située à plus de 600 kilomètres de la capitale Conakry, confirme la difficulté d’émettre des appels internationaux. Il confie qu’ « On ne peut pas appeler, la connexion internet est aussi coupée il y a cinq jours. Le transport entre la capitale Conakry et Kankan est un peu difficile ».

A Kankan, les propriétaires de magasins n’ouvrent pas, de crainte de voir leurs commerces saccagés par les manifestants.

Mais à Kamsar, ville dans le nord-ouest du pays, à plus de 3 heures et demie de Conakry, les tenanciers des boutiques, plutôt proches de Cellou Dalein Diallo, gardent les portes closes. C’est une façon de dénoncer l’élection d’Alpha Condé. Dicko habitant de Kamsar a du mal à se nourrir.

« Ils (les tenanciers de boutiques) font tout cela pour exprimer leur colère parce qu’ils estiment que la victoire de leur candidat Cellou Dalein Diallo lui a été volée. Ça fait maintenant cinq jours qu’on ne trouve pas du pain à manger », témoigne Dicko.

Le ras-le-bol des populations

En Guinée forestière, la ville de N’Zérékoré est relativement calme mais les commerces sont fermés. Les populations espèrent le dénouement de la crise électorale dans une ville où il y a eu des morts pendant les opérations de vote. Paul Sakoubogui, journaliste à N’Zérékoré a pu rencontrer des populations qui en ont ras-le-bol.

« Il y a certaines familles qui ont du mal à faire face à leurs besoins fondamentaux. Nous avons parlé avec des citoyens qui se disent que trop c’est trop. », explique le journaliste.

Il indique avoir échangé avec des populations qui affirment que « Les gens manifestent, les choses ne changent pas. Ces citoyens se demandent pourquoi continuer à se mettre dans des mouvements dans lesquels certains perdent leur vie alors que les choses ne changent pas. Ces habitants demandent de mettre fin à cela afin de continuer à gagner le peu qui leur revenait ».

Dans un rapport publié en septembre dernier, Human Rights Watch pointait du doigt des tensions ethniques et intercommunautaires à N’Zérékoré. L’organisation a dénombré 32 morts dont trois enfants, des maisons, magasins et lieux de culte saccagés lors du double scrutin législatif et référendaire de mars dernier.