Pour l’Afrique, la Suisse veut être un partenaire plus qu’un donateur

La Suisse compte poursuivre sa stratégie de coopération avec l’Afrique sur le même rythme pour les quatre années à venir. Mais veut désormais se positionner comme un véritable partenaire scientifique et économique.

Le 19 février 2020, à Berne, le Conseil fédéral suisse a adopté la stratégie de coopération internationale pour les années 2021 à 2024 élaborée un an plus tôt par les services réunis du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) et de son équivalent pour l’économie, la formation et la recherche, le DEFR. Cette stratégie s’inscrit dans la continuité de celle suivie entre 2017 et 2020, jugée à l’époque aussi « novatrice » que celle défendue par Ignazio Cassis, l’actuel chef du DFAE, au début de cette année.

Pourquoi changer une formule qui gagne, puisque le Conseil fédéral a estimé, toujours en février, que le programme de coopération avait « pour l’essentiel » atteint ses objectifs, « en contribuant à sauver des vies, à réduire la pauvreté, à créer des perspectives économiques et à promouvoir la paix » – et ce pendant quatre ans ?

L’enveloppe attribuée pour financer cette stratégie, laquelle regroupe l’aide humanitaire, la coopération au développement, ainsi que la promotion de la paix et de la sécurité, n’a guère bougé non plus, avec un budget de 11,25 milliards de francs suisses (environ 10,6 milliards d’euros) – soit une hausse de 1,4 % par rapport à la période précédente. L’aide publique au développement (APD) de la Suisse atteint 0,46 % du PNB, et reste donc en deçà du 0,5 % promis par Berne pour 2015.
« Essor fulgurant » de l’Afrique

Faute de moyens supplémentaires, dans un contexte sanitaire et environnemental plus incertain, la Suisse entend « améliorer l’efficacité » de sa coopération par « un recentrage des priorités thématiques et géographiques ». Le nombre de pays prioritaires passe de 46 à 34 à travers le monde, le DFAE prévoyant même de se désengager de l’Amérique latine en 2024.

L’Afrique de son côté semble jouir d’un tout autre statut, comme le montre la tribune qu’Ignazio Cassis lui a consacrée au début de septembre dans la presse alémanique. Le conseiller fédéral y justifie d’abord la politique d’aide extérieure en direction d’un lectorat et d’un électorat prompts à en refuser le principe en cette période de crise. Il cite ensuite « les pays africains qui connaissent un essor fulgurant » en exemple d’une coopération conçue dans « un esprit de partenariat et non plus dans une logique de donateur unilatéral ».

Il s’appuie enfin sur son voyage, à la fin de 2019, dans le sud du continent pour affirmer que la Suisse inspire confiance en Afrique, et qu’il est donc temps pour son pays et pour ses entreprises « de se positionner comme un partenaire scientifique et économique novateur ». « L’Afrique va prendre de plus en plus d’importance dans la nouvelle stratégie 2021-2024 », assure pour conclure Ignazio Cassis. Ne serait-ce que pour répondre aux intérêts propres de la Suisse. La question migratoire sera dorénavant systématiquement incluse dans les accords de coopération signés par Berne.