Tunisie : comment la grogne sociale est montée d’un cran

imgDes revendications sociales ont enflamment la ville de Kasserine depuis la mi janvier et la grogne est désormais en train de gagner d’autres régions du pays. Un climat qui rappelle celui de 2010, juste avant le soulèvement contre Ben Ali.

Le 17 janvier à Kasserine (Nord-Ouest), Ridha Yahyaoui, un jeune chômeur grimpe à un pylône électrique pour dire sa colère. La raison ? Son nom ne figure plus sur une liste d’embauches dans la fonction publique établie par le gouvernorat. Il veut dénoncer un trafic d’influence au profit de parents d’élus locaux. Perché sur son pylône, il meurt électrocuté.

Aussitôt, Kasserine, où 30% de la population est en demande de travail, s’embrase. Plus de 700 jeunes, très déterminés, entament un sit-in et bloquent les routes et le gouvernorat. Les forces de l’ordre ripostent avec des tirs de gaz lacrymogènes. En 48 heures, le mouvement fait tâche d’huile. Les délégations de Rgueb, Menzel Bouzaiane, Meknassy, Mazouna, Gabès, El Fahs, Fernana suivent. Des lieux d’où était partie l’insurrection populaire qui a entraîné la chute du régime de Ben Ali, le 14 janvier 2011.

Les mêmes slogans qu’en 2010-2011

Cinq ans plus tard, les mêmes slogans sont brandis : « travail, dignité et justice sociale ». Ils signifient l’échec des gouvernements successifs à résoudre la crise de l’emploi des jeunes et à réduire les disparités régionales, avec un chômage qui culmine à 15,2% en 2015 contre 12 % en 2010 et un taux de pauvreté au dessus des 20%.

Le gouvernement de Habib Essid est sur le qui vive, même si, à la différence de 2011, la répression policière est plus contenue. À proximité de Kasserine, des terroristes sont retranchés dans les montagnes et les quartiers de Hay Ennour et Ezzouhour, les plus atteints par le chômage, sont considérés comme des foyers de recrutement pour les extrémistes. Mais malgré cette montée de la tension sociale, le ministre de l’emploi, Zyed Laadheri, ne fait aucune déclaration ; seule l’Assemblée des Représentants du peuple (ARP) dépêche une délégation pour « écouter les demandes ».