Coup d’État au Gabon : le dernier d’une série de prises de pouvoir militaires sur le continent

Coup d’État au Gabon : le dernier d’une série de prises de pouvoir militaires sur le continent

Les coups d’État militaires étaient monnaie courante dans certaines régions d’Afrique au cours des décennies qui ont suivi l’indépendance. Mais après une période de relative stabilité démocratique, certains signes indiquent qu’ils sont en hausse.

La prise de pouvoir au Gabon n’est que le dernier d’une série de coups d’État qui ont eu lieu ces dernières années et survient à peine un mois après que les soldats ont pris le contrôle du Niger.

Il y en a eu deux au Burkina Faso en 2022, ainsi que des tentatives de coup d’État manquées en Guinée-Bissau, en Gambie et dans la nation insulaire de Sao Tomé-et-Principe.

En 2021, il y a eu six tentatives de coup d’État en Afrique, dont quatre ont réussi.

Quand peut-on parler d’un coup d’État ?

L’une des définitions utilisées est celle d’une tentative illégale et manifeste de l’armée – ou d’autres responsables civils – de renverser les dirigeants en place.

Une étude menée par deux chercheurs américains, Jonathan Powell et Clayton Thyne, a identifié plus de 200 tentatives de ce type en Afrique depuis les années 1950.

Environ la moitié d’entre elles ont été couronnées de succès, c’est-à-dire qu’elles ont duré plus de sept jours.

Le Burkina Faso, en Afrique de l’Ouest, a connu les coups d’État les plus réussis, avec neuf prises de contrôle et un seul coup d’État raté.

Parfois, ceux qui prennent part à une telle intervention nient qu’il s’agit d’un coup d’État.

En 2017 au Zimbabwe, une prise de pouvoir militaire a mis fin aux 37 ans de règne de Robert Mugabe. L’un des dirigeants, le général de division Sibusiso Moyo, est apparu à la télévision à ce moment-là, niant catégoriquement une prise de pouvoir militaire.

En avril dernier, après la mort du dirigeant tchadien, Idriss Déby, l’armée a installé son fils comme président par intérim à la tête d’un conseil militaire de transition. Ses opposants l’ont qualifié de “coup d’État dynastique”.

“Les putschistes nient presque toujours que leur action est un coup d’État afin de paraître légitimes”, explique Jonathan Powell.

Combien de fois y a-t-il eu des coups d’État en Afrique ?

Le nombre total de tentatives de coup d’État en Afrique est resté remarquablement constant, avec une moyenne d’environ quatre par an au cours des quatre décennies entre 1960 et 2000.

Jonathan Powell estime que cela n’est pas surprenant compte tenu de l’instabilité que les pays africains ont connue dans les années qui ont suivi leur indépendance.

“Les pays africains ont des conditions communes pour les coups d’État, comme la pauvreté et les mauvaises performances économiques. Quand un pays connaît un coup d’État, c’est souvent le signe avant-coureur d’autres coups d’État.”

Les coups d’État ont chuté à environ deux par an au cours des deux décennies jusqu’en 2019.

Nous n’en sommes qu’à trois ans de la décennie actuelle et si, en 2020, un seul coup d’État a été signalé au Mali, le nombre de coups d’État a été nettement supérieur à la moyenne en 2021, avec six coups d’État ou tentatives de coup d’État enregistrés .

Des coups d’État ont été réussis au Tchad, au Mali, en Guinée et au Soudan et des prises de pouvoir militaires ont échoué au Niger et au Soudan.

En septembre 2021, le secrétaire général des Nations unies, António Guterres, s’est inquiété du “retour des coups d’État militaires” et a mis en cause le manque d’unité de la communauté internationale face aux interventions militaires.

“Les divisions géopolitiques sapent la coopération internationale et […] un sentiment d’impunité s’installe”, indique-t-il.

Judd Devermont, du Centre d’études stratégiques et internationales, basé aux États-Unis, estime que l’approche “indulgente” des organismes régionaux et internationaux “a permis aux putschistes de faire des concessions minimales tout en se préparant à rester plus longtemps au pouvoir”.

Ndubuisi Christian Ani, de l’Université de KwaZulu-Natal, affirme que les soulèvements populaires contre des dictateurs en place depuis longtemps ont fourni l’occasion d’un retour des coups d’État en Afrique.

“Si les soulèvements populaires sont légitimes et dirigés par le peuple, leur succès est souvent déterminé par la décision prise par les militaires”, dit-il.

Quels sont les pays qui ont connu le plus de coups d’État ?

Le Soudan a connu le plus grand nombre de coups d’État et de tentatives de prise de pouvoir s’élevant à 17 – dont six ont réussi.

En 2019, le dirigeant de longue date Omar el-Béchir a été écarté du pouvoir après des mois de protestations.

Bashir avait lui-même pris le pouvoir lors d’un coup d’État militaire en 1989.

Le Nigéria était réputé pour ses coups d’État militaires dans les années qui ont suivi l’indépendance, avec huit coups d’État entre janvier 1966 et la prise de pouvoir du général Sani Abacha en 1993.

Cependant, depuis 1999, les transferts de pouvoir dans la nation la plus peuplée d’Afrique se font par des élections démocratiques.

L’histoire du Burundi a été marquée par onze coups d’État distincts, principalement motivés par les tensions entre les communautés hutue et tutsie.

La Sierra Leone a connu trois coups d’État entre 1967 et 1968, et un autre en 1971. Entre 1992 et 1997, elle a connu cinq autres tentatives de coup d’État.

Le Ghana a également eu sa part de coups d’État militaires, avec huit en deux décennies. Le premier a eu lieu en 1966, lorsque Kwame Nkrumah a été écarté du pouvoir, et l’année suivante, des officiers subalternes de l’armée ont tenté en vain de faire un coup d’État.

Globalement, l’Afrique a connu plus de coups d’État que tout autre continent.

Sur les 13 coups d’État enregistrés dans le monde depuis 2017, tous sauf un – le Myanmar en février 2021 – ont eu lieu en Afrique.