Trois intellectuels sénégalais de renom ont imputé le récent accès de violence dans le pays à “la dérive autoritaire” du président Macky Sall et au projet qu’ils lui prêtent de briguer un troisième mandat en 2024.
“La situation que vit actuellement notre pays résulte de la dérive autoritaire du président Macky Sall”, disent Mohamed Mbougar Sarr, Felwine Sarr et Boubacar Boris Diop dans une tribune publiée dans la presse et sur les réseaux sociaux.
Le Sénégal a été en proie la semaine passée à ses pires violences depuis des années après la condamnation d’Ousmane Sonko, opposant farouche à M. Sall et candidat à la présidentielle de 2024, à deux ans de prison ferme dans une affaire de moeurs. Il y a eu au moins 16 morts. Ce verdict rend en l’état actuel M. Sonko inéligible.
Le procès a convaincu les Sénégalais que l’objectif était “l’élimination d’un opposant politique” en vue de la présidentielle, disent les trois auteurs. M. Sall, élu en 2012 et réélu en 2019, est “mû par son désir de se maintenir à tout prix au pouvoir”, affirment-il.
Des crises que le Sénégal a connues depuis son indépendance, celle-ci est “la plus simple à résoudre (…) il suffirait qu’un homme dise: ‘Je renonce à briguer un troisième mandat qui déshonorerait ma parole d’homme, mon pays et sa Constitution'”, écrivent-ils.
Mohamed Mbougar Sarr a remporté le prix littéraire français Goncourt en 2021, Boubacar Boris Diop le prix littéraire américain Neustadt en 2022, et Felwine Sarr est co-auteur d’un rapport de référence sur la restitution du patrimoine culturel africain.
Ils accablent un pouvoir “qui emprisonne ou exile ses opposants les plus menaçants, réprime les libertés (notamment celles de la presse) et tire sur son propre peuple avec une révoltante impunité”. Ils s’en prennent à “la frénésie accumulatrice d’une caste qui s’enrichit illicitement”, indifférente selon eux à la “misère sociale” et au sort de la jeunesse.
Le gouvernement s’inscrit en faux contre l’accusation de dérive autoritaire et invoque son attachement à la démocratie et au maintien de l’ordre. Le président Sall entretient le flou sur ses intentions pour 2024. L’hypothèse d’une candidature rencontre une forte opposition au nom du respect de la Constitution.