Le chef de l’armée sud-africaine a rencontré son homologue russe quelques jours après que son pays a été accusé par les Etats-Unis d’envoyer des armes à la Russie.
Le plus haut général de l’armée russe et son homologue sud-africain ont discuté de « coopération militaire » lors de leur rencontre à Moscou, lundi 15 mai, a déclaré le ministère russe de la défense. L’annonce est intervenue quelques heures après que le président sud-africain, Cyril Ramaphosa, a démenti les accusations des Etats-Unis selon lesquelles son pays se rangeait du côté de la Russie dans la guerre en Ukraine et avait envoyé des armes pour l’aider.
Le général Oleg Salyukov, commandant des forces terrestres russes, a rencontré le chef de l’armée sud-africaine, le lieutenant-général Lawrence Mbatha, au siège du commandement général russe à Moscou, a indiqué le ministère russe.
« Les deux parties ont discuté de questions de coopération militaire et de la mise en œuvre de projets visant à améliorer la préparation au combat des armées des deux pays, a déclaré le ministère dans un communiqué. La réunion entre les commandants militaires a débouché sur des accords concernant le développement de la coopération entre les forces terrestres dans divers domaines. » Le ministère a indiqué qu’une délégation sud-africaine visiterait un certain nombre d’installations « éducatives et de formation » de l’armée russe.
Escale secrète
L’armée sud-africaine a déclaré que ce voyage avait été planifié bien avant que l’ambassadeur des Etats-Unis en Afrique du Sud n’allègue, la semaine dernière, que le pays avait fourni des armes à la Russie lorsqu’un navire soumis aux sanctions américaines a fait une escale secrète dans une base navale sud-africaine en décembre. Le gouvernement sud-africain a nié que l’escale du cargo russe ait donné lieu à une vente officielle d’armes, même s’il n’a pas exclu catégoriquement qu’une transaction d’armes ait eu lieu.
M. Ramaphosa a déclaré qu’une enquête était en cours pour déterminer si quelqu’un avait chargé des armes à bord du cargo Lady R, battant pavillon russe, à la base navale de Simon’s Town, près du Cap.
M. Ramaphosa a profité de son message hebdomadaire à la nation, lundi, pour réaffirmer la position non alignée de l’Afrique du Sud à l’égard de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. La déclaration du président a été perçue comme une réponse à l’ambassadeur américain, Reuben Brigety, qui avait mis en doute la neutralité de l’Afrique du Sud dans la guerre en Ukraine tout en faisant des allégations sur une cargaison d’armes. M. Brigety a ensuite été convoqué à une réunion avec le ministre sud-africain des affaires étrangères.
« Notre position de non-alignement [ne] favorise [pas] la Russie par rapport à d’autres pays [et ne doit pas] mettre en péril nos relations avec d’autres pays, a écrit M. Ramaphosa dans son message hebdomadaire. Nous avons été fermes sur ce point : l’Afrique du Sud n’a pas été, et ne sera pas, entraînée dans une compétition entre puissances mondiales. »
M. Ramaphosa a également laissé entendre que le président russe, Vladimir Poutine, se rendrait en Afrique du Sud pour une réunion des dirigeants du bloc économique des Brics en août – ce que le Kremlin n’a pas confirmé. Un tel voyage entraînerait l’Afrique du Sud dans un autre imbroglio diplomatique, car le pays est signataire du traité qui a créé la Cour pénale internationale (CPI), laquelle a émis en mars un mandat d’arrêt à l’encontre de M. Poutine pour des crimes de guerre présumés impliquant l’enlèvement d’enfants en Ukraine. Depuis, M. Poutine a peu voyagé, et seulement dans des pays qui sont des alliés proches de la Russie. Les pays qui sont parties au traité seraient obligés d’arrêter le dirigeant russe.
Exercices navals
Bien que la Russie et l’Afrique du Sud aient toutes deux décrit la réunion de lundi comme faisant partie d’un voyage bilatéral normal, cette rencontre ne manquera pas de renforcer l’attention portée à l’économie la plus développée d’Afrique, considérée comme une nation influente dans le monde en développement. L’Afrique du Sud est la seule nation africaine du bloc des Brics, qui comprend également le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine.
Outre les allégations relatives aux armes, l’Afrique du Sud a également accueilli des navires de guerre russes et chinois et a participé à des exercices navals au large de sa côte est en février, qui ont coïncidé avec le premier anniversaire de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
M. Brigety a déclaré la semaine dernière que les fonctionnaires américains respectaient la politique de neutralité et de non-alignement de l’Afrique du Sud dans les affaires internationales, mais qu’ils avaient noté une série de problèmes qui suggéraient que, dans la pratique, le gouvernement sud-africain n’était pas non-aligné.
L’agence Associated Press (AP) a vérifié de manière indépendante que le cargo Lady R s’était arrêté à la base navale sud-africaine pendant au moins trois jours en décembre, comme l’a affirmé M. Brigety. Un examen des dossiers effectué par AP montre également que le Lady R est lié à une société qui a été sanctionnée par les Etats-Unis pour avoir transporté des armes pour le compte du gouvernement russe et pour l’avoir aidé dans son effort de guerre en Ukraine.