La transition tchadienne accusée de nombreux manquements

La transition tchadienne accusée de nombreux manquements

Deux ans après l’arrivée au pouvoir de Mahamat Idriss Déby, opposition et société civile critiquent fermement le bilan de son gouvernement.

Annoncée par la junte militaire pour 18 mois, la transition militaire en cours en est à sa deuxième année avec de nombreuses promesses non tenues.

Si certains Tchadiens apprécient la gestion de cette transition en cours et estiment que le pays est resté stable, de nombreux autres ne sont pas satisfaits et dressent un bilan critique.

Ils pensent “qu’il n’y a toujours pas de justice” dans le pays et dénoncent “la corruption qui persiste”. D’autres rappellent la repression des manifestations du 20 octobre 2022. Durant ces manifestations, les forces de sécurité ont tiré sur des manifestants dans plusieurs villes, y compris à N’Djamena, la capitale, tuant plusieurs personnes et en blessant des dizaines d’autres.

Pour certains Tchadiens, il est important que “le gouvernement de transition se réorganise pour pouvoir satisfaire le peuple tchadien”.

Comme le référendum constitutionnel, la rédaction d’une nouvelle Constitution ainsi que l’organisation d’une élection présidentielle afin de rendre le pouvoir aux civils. A cela s’ajoute la prolongation unilatérale de cette transition pour 24 mois par le dialogue national, boycotté par la société civile et l’opposition à la transition.

Échecs multiples

Max Kemkoye est le président de l’UDP, Union des démocrates pour le développement et le progrès.

“Dans cette transition, il n y a que échec, médiocrité et en plus amateurisme. Echec d’abord des pourparlers de Doha, échec de l’organisation du dialogue, échec du dialogue lui-même, échec dans la mise en œuvre des résolutions issues de ce fameux dialogue et échec même de la gestion de cette transition qui mène le pays tout droit dans le mur. Les conditions de vie de la population, la santé, l’éducation, le manque d’électricité et que sais-je encore… de tout ce que je viens de citer là, il n’y a absolument rien.”

Une transition sanglante

De son côté, la société civile dresse également un bilan négatif, en raison des nombreux conflits qui ont endeuillé le Tchad durant cette transition. Jean-Bosco Manga est journaliste, écrivain et activiste des droits humains :

“Cette transition n’a fait que le bonheur des principaux acteurs dont certains se sont vite enrichis. C’est une transition imbibée du sang des Tchadiennes et des Tchadiens, à l’exemple des massacres de Faya (Nord), Abéché (Est), Sandana (Sud), du Logone Occidental à Deli (Centre), dans les Monts de Lam (Ouest), sans oublier les manifestants qui ont été tués au début de la transition, en avril 2021, et bien sûr, les massacres du 20 octobre 2022, dont on a prétendu condamner et grâcier les victimes”.

Des défaillances à corriger

Des critiques dont est bien conscient le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement de transition, Aziz Mahamat Saleh : “Il ne s’agit pas de dire qu’on a tout réussi. Non, pas du tout, la transition n’est pas finie. Je voudrais que vous analysiez ce qui se passe dans les pays voisins. En Libye, la transition dure depuis 2011, douze ans… et au Soudan depuis 2018. Nous espèrons pouvoir tenir l’échéance, le référendum et les élections. Il y a bien évidemment des défaillances qu’il faut corriger.”

Il faut noter que deux ans après la mort violente de l’ancien président Idriss Déby Itno, aucune précision sur les circonstances de son décès n’a jusque-là été apportée.