Après la démission forcée du président désigné pour conduire une transition de 18 mois, l’instigateur principal de ces évènements qui ont conduit à cette démission, le colonel Assimi Goïta, dans un premier temps autoproclamé président de la transition puis confirmé par la Cour constitutionnelle, a prêté serment devant la Cour suprême, le lundi 7 juin dernier. C’était au cours d’une cérémonie organisée pour la circonstance dans la salle des mille places du Centre international de conférences de Bamako (Cicb) en présence de plusieurs personnalités politiques et de la société civile malienne, ainsi que des représentants de plusieurs représentations diplomatiques accréditées dans notre pays.
Après l’ouverture de la séance par le président de la Cour, la greffière a fait la lecture de l’arrêt de la Cour constitutionnelle qui désigne le colonel Assimi Goïta pour diriger la transition malienne. Cette lecture a été suivie du réquisitoire du Procureur général près la Cour suprême du Mali qui a rappelé le parcours militaire du désormais président de la transition.
A l’issue de la cérémonie protocolaire, le président de la transition, le colonel Assimi Goïta, a prononcé son premier discours en sa qualité de chef de l’Etat où il a précisé qu’il entend imprimer une nouvelle dynamique qui offre l’opportunité de remettre le processus de la Transition dans le sens souhaité par le peuple.
Il ajoutera que les défis sont immenses et les attentes légitimes du peuple sont grandes. “Nous devons cependant renforcer notre résilience et notre espérance pour une meilleure vie. Cela est d’abord de ma responsabilité en tant que chef de l’Etat. J’en mesure l’ampleur.
Aussi voudrais-je vous affirmer solennellement, ici et maintenant, ma ferme détermination à relever ce défi, mais tout cela n’est possible que dans la cohésion et la solidarité qui ont toujours caractérisé notre nation et qui sont mises à rudes épreuves. Il s’agit, en effet, sur la base de la feuille de route de conduire la mise en œuvre des actions prioritaires nécessaires à la réussite de la transition, notamment l’organisation d’élections crédibles, justes et transparentes aux échéances prévues”, a fait savoir le désormais ancien vice-président de la transition.
Réduction du train de vie de l’Etat
A le croire, il s’emploiera également à la réduction du train de vie de l’Etat. “D’ores et déjà j’ai décidé d’allouer les 2/3 du fonds de souveraineté du président soit 1 milliards 800 millions Fcfa aux œuvres socio-sanitaires, notamment pour favoriser l’accès à l’eau potable et aux soins de santé primaires dans les zones difficiles de notre pays”, a-t-il martelé.
Selon lui, face à ces impératifs aucune couche et aucun groupe ne sera écarté car le Mali a besoin de chacun et de tous. Et de poursuivre qu’il comprend les inquiétudes devant les difficultés qui assaillent les Maliens depuis plusieurs années.
“Comme nous le savons tous, il y a des moments décisifs où se joue le destin d’une nation. La nôtre éprouvée depuis des décennies devra trouver les ressorts nécessaires pour rebondir et assumer pleinement son destin historique. Ceci est dévolu à notre génération, oui c’est notre dette envers les générations futures”, a laissé entendre le colonel Assimi Goïta.
Il a saisi l’occasion pour féliciter les forces de défense et de sécurité pour leur courage et les incite à plus de détermination. Et de rassurer que l’Etat, dans la mesure de ses moyens, fournira les ressources nécessaires à l’accomplissement de leurs missions.
Aussi, il a réaffirmé son engagement pour assurer une meilleure gouvernance et une meilleure distribution des services publics au bénéfice des populations sur l’ensemble du territoire. Avant de déclarer que l’apaisement du climat social demeure un gage de succès pour la réussite de la transition, l’amélioration des conditions de vie des Maliens sera un souci constant pour le nouveau gouvernement qui la recherchera de façon intelligente pour ne pas fragiliser l’équilibre budgétaire et compromettre les investissements.
Engager un dialogue franc et sincère
Ainsi, il a demandé au nouveau gouvernement l’engagement d’un dialogue franc et sincère avec l’ensemble des syndicats pour une résolution durable de la crise actuelle. “C’est l’occasion pour moi d’exprimer ma reconnaissance à l’ensemble des personnes qui bâtissent notre pays par leur labeur quotidien chacun dans sa manière et dans sa sphère qu’ils s’agissent des agriculteurs, des pêcheurs, des éleveurs, des opérateurs économiques, des artisans, des fonctionnaires des communicateurs et des autorités traditionnelles et religieuses. Je n’oublie pas également les femmes et les jeunes auxquels une attention particulière sera accordée”, a-t-il rassuré.
A ses dires, sa conviction profonde est que les filles et les fils de ce pays dans un élan de solidarité et d’un engagement commun ne pourraient nullement échouer s’ils se donnaient la main en transcendant les divergences et leurs contradictions lorsqu’il s’agit du Mali, ce pays qui nous a été légué par nos devanciers et que nous devons à notre tour transmettre à nos enfants dans la continuité de la fierté légendaire du peuple malien.
Aux dires du colonel Assimi Goïta, le Mali est resté actif au plan international et a bénéficié de la solidarité d’autres pays, particulièrement en ce moment de crise multidimensionnelle. A ce titre, il a exprimé sa gratitude et son attachement à cette solidarité internationale pour la stabilité du Mali. “Nous apprécions à leurs justes valeurs les sacrifices qu’ils consentent pour notre pays. Toute chose qui renforce notre détermination et notre combat pour le développement durable et la justice sociale”, a-t-il indiqué.
Respect des engagements internationaux
Le tout-nouveau président de la transition n’a pas manqué l’occasion pour rassurer les organisations sous régionales, régionales et la Communauté internationale en général que le Mali va honorer l’ensemble de ses engagements pour l’intérêt supérieur de la nation.
Pour finir, il a rappelé que les autorités de la transition continueront le travail entamé dans le cadre de la mise en œuvre intelligente et efficiente de l’accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, en vue de créer les conditions optimales d’une paix durable. Et d’ajouter que les conclusions du dialogue national inclusif continueront d’être mises en œuvre de façon judicieuse. “L’espoir est permis et c’est ensemble que nous relèverons le défi. Vive le Mali dans une Afrique unie et prospère. Que Allah bénisse notre pays”, a-t-il conclu.
Boubacar PAÏTAO
Auteur de deux coups d’état à l’intervalle de huit mois :
Le colonel Assimi Goïta se hisse enfin de la tête de la Transition
Président du Comité national pour le salut du peuple (CNSP), le colonel Assimi Goïta révélé au grand public malien lors du coup d’Etat qui a mis fin au régime du président IBK le 18 août 2020, est né en 1983.
l’issue du putsch contre IBK, il a été désigné vice-président de la Transition chargé des questions de défense nationale et de sécurité intérieure. Ainsi, il récidive le 24 mai dernier en renversant le président désigné de la Transition, le colonel-major d’aviation à la retraite Bah N’Daw. Et depuis, il est désigné pour conduire le reste de la Transition.
Fils d’un officier des Forces armées maliennes, il est formé dans les académies militaires du Mali notamment le Prytanée militaire de Kati et l’Ecole militaire interarmes de Koulikoro. Il dirige les forces spéciales maliennes dans le Centre du pays qui est confronté à l’insurrection jihadiste.
Après le coup d’Etat contre le président IBK, le 19 août 2020, le colonel Assimi Goïta est désigné président du Comité national pour le salut du peuple. L’adoption de l’acte fondamental, le 24 août 2020, fait de lui de facto le chef de l’Etat du Mali. Face au refus de la communauté internationale qu’il prenne la tête de la Transition ou le droit de succéder au président de Transition désigné, il est finalement désigné vice-président de la Transition, le 21 septembre 2020.
Peu de temps après l’annonce de la liste du second gouvernement de Moctar Ouane où deux membres du défunt CNSP, le président Bah N’Daw, le Premier ministre et le ministre de la Défense sont interpellés puis conduits sous escorte militaire à Kati.
Le lendemain, le colonel Assimi Goïta annonce avoir “demis de leurs prérogatives” le président et le Premier ministre, qu’il accuse de sabotage de la Transition, leur reprochant d’avoir formé un nouveau gouvernement sans le consulter sur le choix du ministre de la Défense et celui de la Sécurité.