Le Burkina Faso nationalise deux mines d’or. Des mines jusqu’à présent contrôlées par une major britannique, considérée comme le premier producteur d’or au monde.
Les nouvelles sont rares. Et, de surcroît, elle n’est pas donnée par les grands médias. Elle circule sur le net. Et ce n’est pas grand-chose non plus. Après tout, qui s’en soucie ? Il y a plus important pour les conformistes d’Italie et d’Europe. Beaucoup plus important au niveau de l’actualité… la pression sur le gouvernement, pour le gaspillage du comportement (disons) de San Giuliano… Les hypothétiques politiques d’aide à la naissance… Pour ceux qui s’intéressent – mais ils sont certes très peu nombreux – à ce qu’on appelle les affaires étrangères, il y a la situation en Ukraine, il y a le comportement d’Israël au Moyen-Orient…
Et pourtant, les nouvelles du Burkina Faso sont importantes. Beaucoup plus qu’on ne le pense à première vue.
Parce qu’elle représente un signe clair et décisif de la volonté de l’Afrique de sortir d’une longue, trop longue, condition de minorité. De soumission à l’Occident.
Beaucoup, beaucoup trop d’années se sont écoulées depuis que Marco Cochi – un grand africaniste et surtout un ami inoubliable – a écrit son «Afrique. Le continent oublié». Un ouvrage aujourd’hui presque introuvable, mais qui devrait être réédité et surtout relu. Avec beaucoup d’attention.
Car Cochi a pressenti et anticipé ce qui se passe aujourd’hui. La crise, irréversible, du pouvoir européen sur l’Afrique. Et surtout de ce vilain rêve qu’était la Françafrique. Mauvaise pour les Africains, bien sûr, qui ont été exploités et saignés à blanc sans état d’âme. Et, surtout, sans rien recevoir en retour.
Lorsque Cochi écrivait, il y a une trentaine d’années, il prédisait déjà le réveil de l’Afrique noire, à partir précisément du Burkina Faso où, malgré une répression impitoyable, la mémoire de Sankara restait vivante.
Et c’est précisément du Burkina que cette nouvelle nous parvient aujourd’hui. Le Burkina n’est plus un soulèvement isolé, comme à l’époque de Sankara, qui a payé de sa vie cet isolement politique.
Car, aujourd’hui, la situation de l’Afrique du Nord et de l’Afrique centrale, ou de ce qu’il convient d’appeler l’Afrique Noire, a profondément changé.
Outre le Burkina, les Français et même les Britanniques sont chassés de la plupart des États de la région, Niger, Mali, Tchad… et cette révolte africaine s’étend.
Un réveil des élites locales, qui ont pris conscience d’elles-mêmes. Qui ne veulent plus vivre dans la corruption pour un salaire de misère, laissant leurs peuples à la famine et surtout à l’exploitation.
Des élites, il faut le dire, essentiellement militaires. Formées en Europe et aux États-Unis. Donc bien conscientes du rôle des grands «frères» de l’Occident. Et qui, aujourd’hui, veulent prendre en main le destin de cette partie de l’Afrique. La racheter de l’exploitation séculaire. La transformer en une nouvelle réalité, active tant sur le plan économique que géopolitique.
Le Burkina Faso qui revendique la propriété de ses mines d’or et chasse les Français qui les exploitaient n’en est qu’un signe.
Bientôt, tout le monde devra compter avec cette nouvelle Afrique.
Des comptes difficiles pour les Européens, qui peinent encore à prendre conscience de cette nouvelle réalité