Le peuple tchadien est appelé à se rendre aux urnes le lundi 6 mai 2024 pour élire le prochain président de la République. Dix (10) candidats sont en lice pour cette course à la magistrature suprême au Tchad.
L’élection présidentielle au Tchad est prévu dans moins d’un mois. Le Conseil constitutionnel a rendu publique la liste des candidats retenus pour participer à cette élection qui revêt un enjeu pour ce pays en transition depuis le décès d’Idriss Deby Itno sur le champ de bataille.
Son fils, Mahamat Idriss Deby qui lui a succédé et qui dirige le pays depuis avril 2021, fait partie des candidats retenus pour cette présidentielle. Son opposant devenu son Premier ministre, Succès Mastra est également dans la course à la présidence de la République au Tchad.
A l’issue des dépôts de candidature qui s’est déroulé du 6 au 15 mars derniers, le Conseil constitutionnel a reçu en tout 20 dossiers. Mais, il n’a retenu que 10, les autres dossiers étant jugés « irrecevables » et « non conformes » par la haute juridiction en raison, selon elle, d’irrégularités dans les pièces administratives qui sont requises.
Parmi les candidats recalés se trouvent les deux principales figures de l’opposition, Nassour Ibrahim Neguy Koursami et Rakhis Ahmat Saleh pour pièces administratives non conformes.
Nassour Ibrahim Neguy Koursami fait l’objet d’une « enquête préliminaire en vue de poursuite pénale » pour « faux et usage de faux » à cause des soupçons sur l’authenticité des pièces justificatives dans son dossier de candidature.
Une présidentielle dans un contexte difficile pour le pays
La crise née de l’augmentation des produits pétroliers, ajouté au flux de réfugiés dans le pays, a amené le gouvernement à décréter l’état d’urgence alimentaire et nutritionnelle. Mais les bailleurs ne se mobilisent pas pour autant au chevet du Tchad.
Selon l’Ong Action contre la faim, environ 480 000 enfants souffrent de malnutrition au Tchad.
Parallèlement, les manifestations prévues par les organisations de la société civile pour protester contre cette situation difficile, sont interdites à chaque fois par le régime.
Cependant, Mahamat Idriss Deby devra passer par cette élection pour légitimer son pouvoir, s’il sort vainqueur du scrutin.
De plus, la fin de la transition est prévue pour le 10 octobre 2024. Pour Ahmet Bartchiret, président de ANGE, au-delà de cette date, le pays tombera dans un vide juridique, synonyme d’un chaos prévisible. Il est donc impératif de tenir les élections avant.
C’est donc un tournant décisif, c’est en cela que la présidentielle constitue un enjeu pour le Tchad où d’autres figures de la classe politique, tel que Succès Mastra veulent accéder à la magistrature suprême.
Combien de Tchadien vont voter le 6 mai prochain ?
Le premier tour de l’élection présidentielle au Tchad est fixé au lundi 6 mai 2024, selon l’Agence nationale de gestion des élections (ANGE). Ce scrutin mettra fin à 3 années de transition dans le pays.
C’est le fichier électoral ayant servi pour le référendum de décembre dernier qui sera utilisé dans le cadre de cette élection présidentielle. L’ANGE a indiqué à environ 63 % le taux de participation des électeurs lors de ce référendum.
Sur la base de ce fichier électoral, plus de 8 millions d’électeurs sont inscrits sur la liste électorale, sur 17,72 millions d’habitants que compte le Tchad. Ces électeurs se rendront aux urnes pour élire le prochain président de la République.
Les institutions impliquées dans l’organisation d’élections au Tchad
Pour les élections présidentielles et législatives, c’est le Conseil constitutionnel, après la vérification de la régularité des opérations de vote, proclame les résultats définitifs de ces élections, après les résultats provisoires qui lui sont transmis par la Commission électorale nationale indépendante (CENI).
Présidé par Jean-Bernard Padaré, le Conseil constitutionnel est composé de neuf (09) membres dont cinq (05) magistrats.
C’est le même Conseil constitutionnel qui, après vérification des dossiers de candidature, rend publique la liste définitive des candidats retenus pour participer aux élections.
Dans un passé récent, c’est la CENI qui se charge de la centralisation des procès-verbaux et la publication des résultats provisoires. Mais, cet organe a été remplacé en janvier dernier par l’Agence nationale de gestion des élections (ANGE) qui jouera désormais ce rôle au Tchad.
Contrairement à la CENI, l’ANGE est un organe permanent composé de quinze membres choisis parmi les hautes personnalités selon des critères stricts de compétence, d’impartialité et d’indépendance, selon le décret signé le 29 janvier dernier, promulguant la loi de sa création.
Ces membres sont nommés pour un mandat de sept ans renouvelable une fois. Ils prêtent serment avant d’entrer en fonction.
L’ANGE a donc pour mission d’organiser le recensement électoral, assurer la mise à jour du fichier électoral, constituer, gérer et conserver le fichier électoral national, arrêter et publier les listes électorales, conformément aux dispositions du Code électoral, réaliser la cartographie.
Pour les élections locales et communales, c’est la Cour suprême qui se charge de publier les résultats définitifs.
Qui peut voter au Tchad ?
Selon l’article 3 du Code électoral du Tchad, tout citoyen des deux sexes, âgé de dix-huit (18) ans révolus peut voter. L’électeur doit jouir de ses droits civiques et politiques et être inscrit sur les listes électorales.
Il ne doit non plus être dans aucun des cas d’incapacité prévu par la loi.
Le mode de scrutin
L’élection présidentielle au Tchad a lieu au scrutin uninominal majoritaire à deux tours. Le président de la République est élu pour un mandat de 5 ans renouvelable une seule fois.
Le candidat ayant la majorité absolue des suffrages exprimés est élu au premier tour. A défaut, un second tour est organisé le deuxième dimanche suivant entre les deux candidats arrivés en tête au premier tour. Celui qui recueille le plus de voix est déclaré élu.
Qui peut être candidat à l’élection présidentielle au Tchad ?
Pour candidater à l’élection présidentielle dans ce pays, selon l’article 148 du Code électoral, il faut :
- être tchadienne ou tchadien de naissance, né d’un père et de mère eux-mêmes tchadiens et n’avoir pas une nationalité autre que tchadienne
- avoir au moins trente-cinq (35) ans,
- jouir de tous ses droits civiques et politiques,
- avoir une bonne santé physique et mentale,
- résider sur le territoire de la République du Tchad depuis au moins un an au cours des trois dernières années
- se mettre en position de disponibilité si on est membre des Forces de défense et de sécurité (article 149),
- verser au trésor une caution de dix millions (10 000 000) de francs CFA, remboursable si le candidat a obtenu au moins dix pour cent (10%) des suffrages exprimés au premier tour (article 152).
Les candidats à la présidentielle du 6 mai prochain
Les dépôts de candidature dans le compte de cette élection présidentielle au Tchad se sont déroulés du 6 au 15 mars derniers. Au terme de ce délai, le Conseil constitutionnel a enregistré 20 dossiers de candidature, il en a retenu dix (10) après examen.
Le président de la transition, Mahamat Idriss Deby figure parmi les candidats autorisés à cette élection. Il est porté par la coalition Tchad Uni. Son Premier ministre, longtemps opposant au régime, Succès Mastra est également parmi les candidats retenus. Il est soutenu par la coalition Justice et Egalité. Ce sont les deux importantes personnalités qui participent à cette présidentielle.
On note également la présence de Lydie Beassemda parmi les candidats. C’est la deuxième fois que cette candidate qui défend la place des femmes dans les sphères de décision de la République, participe à une élection présidentielle au Tchad.
L’ingénieure en industries agro-alimentaires, présidente du Parti Démocratique du Tchad (PDI), est la seule femme parmi les dix (10) candidats retenus.
Elle était déjà candidate sous Déby père, en avril 2021. Lydie Beassemda est arrivée à la 3e position à la suite des résultats officiels de la présidentielle de 2021, derrière Pahimi Padacké Albert, arrivé deuxième, selon le Conseil constitutionnel.
L’ancien Premier ministre Pahimi Padacké Albert reste l’autre candidat phare à cette élection présidentielle au Tchad. Le candidat du Rassemblement national des démocrates tchadiens (RNDT-Le Réveil) était deuxième derrière Idriss Déby Itno lors de la présidentielle d’avril 2021.
En dehors de ces trois candidats que des observateurs donnent favoris pour cette élection, même si les deux principaux opposants ont été écartés de la course, sept (07) autres candidats sont en lice pour la magistrature suprême.
Voici la liste des candidats retenus pour la présidentielle du 6 mai
- Alladoum Djarma Baltazar
- Assyongar Masra Succès
- Bebzouné Bongoro Theophile
- Lydie Beassemda
- Mahamat Idriss Deby Itno
- Mansiri Lopsékréo
- Mbaimon Guedmbayë Brice
- Nasra Djimasngar
- Pahimi Padacke Albert
- Yacine Abderamane Sakine
Ces candidats qui ont débuté la campagne électorale cette semaine pour solliciter le suffrage des électeurs, connaîtront leur sort aux lendemains du 6 mai prochain à la suite des résultats officiels.
Comment sont publiés les résultats des élections présidentielles au Tchad ?
Le nouveau Code électoral validé par le Conseil national de transition (CNT) ne prévoit plus l’affichage des résultats devant les bureaux de vote après les dépouillements. Ce qui n’est pas le cas dans l’ancien code. Aussi, les représentants des partis politiques ne recevront plus de copie de procès-verbaux.
Des dispositions que l’opposition qualifie de recul qui annonce l’absence de transparence dans le processus électoral.
L’Agence nationale de gestion des élections (ANGE) a jusqu’à quinze (15) jours après l’élection, pour proclamer les résultats provisoires.
Les démembrements de ANGE centralisent les procès-verbaux des dépouillements qui sont effectués après la fermeture des bureaux de vote, par la commission de dépouillement selon l’article 67 du Code électoral.
Les résultats sont publiés par circonscription électorale. L’Agence de gestion des élections tient cependant un fichier des résultats bureau de vote par bureau de vote.
En ce qui concerne les résultats définitifs
Au Tchad, c’est le Conseil constitutionnel qui proclame les résultats définitifs des élections présidentielles. L’ANGE transfère sans délai les résultats provisoires à la haute juridiction qui contrôle la régularité des opérations électorales.
Les délais de proclamation définitive des résultats varient selon que les candidats formulent ou non des requêtes ou les contestent.
En cas de contestation, le Conseil constitutionnel a jusqu’à quinze (15) jours après les résultats provisoires, pour rendre publics les résultats définitifs.
Lorsqu’aucune contestation n’est formulée et que le Conseil constitutionnel estime que l’élection s’est déroulée dans des conditions régulières, il publie les résultats définitifs dans les dix (10) jours qui suivent la transmission des résultats provisoires par l’ANGE. Des dispositions contenues dans les articles 144 et 145 du Code électoral.
Dans le cas d’espèce, c’est-à-dire pour cette élection présidentielle, si aucun candidat ne recueille la majorité absolue des suffrages le 6 mai prochain, l’ANGE prévoit un deuxième tour qui aura lieu le 22 juin 2024, avec la proclamation des résultats provisoires prévue pour le 7 juillet, soit deux semaines plus tard. Les résultats définitifs du second tour seront proclamés le 20 juillet 2024.