Plus de 15 000 personnes tuées, des centaines de milliers de réfugiés, des millions de déplacés et une famine qui frappe plus du tiers de la population… Les conséquences du conflit qui oppose depuis un an Hemetti à Burhane sont catastrophiques. État des lieux en infographies.
Un an, 15 000 morts, et toujours aucune issue en vue. Le 15 avril 2023, les premiers affrontements éclataient au cœur de la capitale soudanaise. Les forces de soutien rapide (FSR) ralliées au commandant Mohamed Hamdane Daglo – dit Hemetti – ont, depuis, étendu leur emprise au-delà de Khartoum. L’influence des anciens Janjawids, qui furent les supplétifs de la dictature islamo-militaire d’Omar el-Béchir, se fait à nouveau sentir jusqu’au Darfour, dans l’ouest du pays, où l’on dénombre plus du tiers des victimes civiles recensées en un an. De son côté, l’armée soudanaise loyale à Abdel Fattah al-Burhane, qui peine à contenir les attaques des FSR, a basé l’essentiel de sa stratégie sur des bombardements aériens, qui font des ravages parmi les civils.
La conférence internationale pour le Soudan, qui s’est tenue à Paris le 15 avril 2024, s’est terminée par la promesse d’une aide humanitaire d’un peu plus de deux milliards d’euros. Une promesse bien supérieure aux 190 millions d’euros initialement récoltés, mais bien loin des 3,8 milliards d’euros nécessaires pour répondre aux besoins des réfugiés, selon les Nations unies.
Dans cette guerre, les civils sont littéralement pris entre deux feux. Au point de souvent devenir les cibles principales des belligérants. L’Acled a mesuré que, sur les 15 000 personnes tuées dans ce conflit, dont une forte proportion n’étaient pas des combattants, au moins 4 000 ont perdu la vie lors d’attaques visant spécifiquement des civils. À ces morts s’ajoutent en outre les enlèvements et disparitions forcées et, dans certains cas, les violences sexuelles systématiques.
Fuir la guerre
Première conséquence de ces violences : les populations tentent de fuir les zones de combat. Au Soudan, l’Office international des migrations a dénombré plus de 6,6 millions de personnes déplacées internes, pour un total de plus de 8 millions de personnes ayant dû fuir leur foyer.
Dans les pays frontaliers, la crise se fait sentir avec acuité. Les réfugiés soudanais se comptent en centaines de milliers. C’est le Tchad qui en accueille le plus grand nombre, plus de 57 000, suivi de l’Égypte, qui en recense un demi-million sur son territoire. Viennent ensuite le Soudan du Sud (140 000 personnes), l’Éthiopie (43 000) et la Centrafrique (23 000).
Et beaucoup craignent que la situation s’aggrave. « Au-delà du financement, il faut mettre de la pression pour qu’il y ait un cessez-le-feu immédiat parce que, si l’on continue comme ça, dans un an, le Soudan risque de se désintégrer », a averti le chef de la diplomatie tchadienne, Mahamat Saleh Annadif, lors de la conférence de Paris.
Sur le front de la sécurité alimentaire, la situation est également catastrophique, y compris dans les camps de déplacés, au Soudan, et dans les camps de réfugiés situés dans les pays limitrophes. La faute à une campagne agricole 2023 bouleversée par les affrontements, des pluies irrégulières et un coût élevé des intrants. Les rendements agricoles ont chuté de 80 % par rapport à la normale dans les régions du Grand-Kordofan et du Grand-Darfour. Le pays a enregistré une baisse de 46 % de sa production céréalière en 2023.
Dans le camp de Zamzam, au Darfour, un enfant meurt toutes les deux heures, révèle Médecins sans frontières. Sur les 48 millions de Soudanais, 18 millions sont en situation d’insécurité alimentaire aiguë. L’Unicef estime que 3,66 millions d’enfants de moins de 5 ans sont concernés, de même que 1,2 million de femmes enceintes ou allaitantes. La situation, qui s’aggrave au fil des mois, pourrait aboutir à « la plus grande crise alimentaire mondiale », selon les dires de la directrice exécutive du Programme alimentaire mondial, Cindy Hensley McCain.