Le chef de l’armée rentre au Soudan après une visite en Egypte, 39 morts au Darfour

Le chef de l’armée rentre au Soudan après une visite en Egypte, 39 morts au Darfour

Le chef de l’armée soudanaise, le général Abdel Fattah al-Burhane, est rentré au Soudan après une visite mardi chez son grand allié et voisin égyptien, son premier voyage à l’étranger en quatre mois d’une guerre qui a de nouveau tué des dizaines de civils.

Au moins 39 personnes, en majorité des femmes et des enfants, ont été tuées par des tirs de roquettes mardi à Nyala, chef-lieu du Darfour-Sud (ouest), lors de combats entre l’armée et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), selon un médecin et des témoins.

Le général Burhane est de retour à Port-Soudan sur la mer Rouge, après avoir été reçu mardi par le président Abdel Fattah al-Sissi à El-Alamein, sur la côte nord de l’Egypte, a indiqué le Conseil de souveraineté, plus haute autorité du Soudan.

M. Sissi a “confirmé la position ferme de l’Egypte aux côtés du Soudan et son soutien à sa sécurité, sa stabilité et son intégrité territoriale”, selon la presse d’Etat.

En embarquant dans un avion à Port-Soudan pour se rendre en Egypte, le général Burhane était apparu pour la première fois en costume civil depuis le début du conflit le 15 avril, semblant vouloir affirmer son autorité en tant que président du Conseil de souveraineté.

Il avait limogé en mai du poste de N°2 le général Mohamed Hamdane Daglo, le chef des FSR, avec qui il avait mené son putsch en 2021 et devenu désormais son grand ennemi.

Les FSR “se sont rendues coupables de crimes de guerre”, a accusé le général Burhane, affirmant à une chaîne de télévision égyptienne que “l’armée cherche à mettre fin à la guerre et à reprendre la transition démocratique”.

Il a aussi remercié Le Caire pour le “soutien et l’accueil” réservés aux 280.000 Soudanais ayant trouvé refuge en Egypte depuis le début de la guerre.

Familles tuées

La guerre entre l’armée et les FSR a fait au moins 5.000 morts, un bilan très sous-estimé en raison du chaos général.

Dans la banlieue Est de la capitale, à Sharq el-Nil, les FSR ont essuyé mardi des “tirs d’artillerie”, ont rapporté à l’AFP des témoins.

Au Darfour, “cinq familles entières ont été tuées en une journée et d’autres ont perdu trois ou quatre des leurs” à Nyala, selon le militant des droits humains Gouja Ahmed.

Sur les réseaux sociaux, des images que l’AFP n’a pu authentifier dans l’immédiat montrent des dizaines de corps alignés puis des hommes les mettant en terre dans une immense fosse.

Depuis le 11 août, plus de 50.000 personnes ont dû fuir les violents combats de Nyala, deuxième ville la plus peuplée du Soudan, selon l’ONU.

Fief des FSR, le Darfour est probablement la région où les combats sont les plus meurtriers. Des civils armés et des combattants tribaux se sont jetés dans la bataille désormais menée sur des bases ethniques, selon l’ONU, et des centaines de milliers de Darfouris ont fui au Tchad voisin.

“Mercenaires”

L’ONU recense plus de 4,6 millions de déplacés et réfugiés depuis le début du conflit au Soudan.

En visite au Soudan du Sud voisin, le Haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés, Filippo Grandi, a alerté mardi sur le sort des 240.000 Sud-soudanais réfugiés au Soudan et désormais revenus dans leur pays “déjà en proie à une terrible catastrophe humanitaire”.

Alors que raids aériens et combats ne faiblissent pas, les rumeurs sur des négociations entre les généraux rivaux se multiplient.

La récente sortie, la première en quatre mois, du général Burhane de son QG à Khartoum assiégé par les FSR alimentait les espoirs d’une sortie de crise négociée, même s’il a appelé lundi à se “concentrer sur la guerre” plutôt que sur “les discussions” face à des “mercenaires”.

Au début du conflit, Ryad et Washington avaient joué les médiateurs mais les nombreuses trêves annoncées n’ont que très peu duré.

L’Egypte, elle, a réuni en juillet les six autres pays voisins du Soudan pour obtenir un soutien international face à l’arrivée des réfugiés.

Des parties étrangères sont impliquées dans le conflit, selon les experts.

D’un côté, Le Caire et Ankara soutiennent l’armée, de l’autre, les Emirats arabes unis et les mercenaires russes de Wagner appuient les FSR.

Le général Burhane pourrait se rendre en Arabie saoudite, assurent des commentateurs locaux.

“L’Arabie s’oppose à la position des Emirats, tout comme MM. Sissi et Burhane”, décrypte pour l’AFP Magdi el-Gizouli, du Rift Valley Institute.