Le 13 juin 2022, les troupes du M23 entraient dans Bunagana. Un an plus tard, une sécurité très précaire règne toujours dans cette ville du Nord-Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC). L’administration congolaise n’a toujours pas repris son contrôle, malgré l’intervention de la force de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC).
Les soldats du M23 ont, selon le porte-parole des soldats ougandais stationnés dans Bunagana, quitté la ville pour les collines de Sabino. Une partie des réfugiés qui étaient partis en Ouganda sont revenus pour cultiver leurs champs. Mais le poste-frontière n’a pas été rouvert avec ce pays par les autorités congolaises. Les produits de première nécessité arrivent donc en contrebande.
« Bunagana, c’est une ville qui est sur la frontière, rappelle Reagan Miviri, chercheur au groupe d’études sur le Congo et à l’Institut congolais de recherche Ebuteli en RDC, au micro de Claire Fages. Cela veut dire qu’il y a forcément des interactions entre l’Ouganda et la RDC au travers de cette frontière qui reste quand même ouverte. En même temps, on ne peut pas dire qu’il y a la normalité. Ça reste une zone occupée et la population se sent toujours en-dehors des structures normales de l’administration congolais ».
La population reconnaît que les soldats du M23 ne portent plus les armes à Bunagana, mais dit qu’elle vit toujours dans la peur car le M23 administre toujours la ville. DePaul Bakulu, militant de la Lucha de Goma, a pu recueillir leur témoignage : « La vie semble reprendre son cours de tous les jours, mais très timidement, parce que les gens sont dans l’obligation de ne pas critiquer quoi que ce soit par rapport à la gestion et aussi de ne pas donner une quelconque information par rapport à ce qui se passe à Bunagana actuellement, parce qu’ils ont peur des exécutions, des arrestations et des tortues qu’utilisent le M23 afin de les soumettre sous leurs ordres. »
« C’est le M23 qui tient l’administration de toutes ces zones »
Le M23 est donc toujours présent, malgré l’intervention des soldats kenyans, soudanais puis ougandais de la force militaire est-africaine. Et cela signe l’échec de cette mission de l’EAC dans le Nord-Kivu, estime le chercheur au Groupe d’études sur le Congo et à l’Institut Ebuteli, Reagan Miviri : « On a vu au travers des mois qu’il s’est créé plutôt une sorte de relation où les Ougandais sont d’un côté, le M23 de l’autre côté. C’est une stabilité précaire qui s’est créée. Les Ougandais et les Kenyans ne jouent aucun rôle administratif, ce qui signifie que dans cette zone-là, peu importe la présence de ces militaires de la Communauté est-africaine, c’est le M23 qui tient l’administration de toutes ces zones. »
L’administration congolaise n’a donc pas repris le contrôle de la zone des mains du M23 et les enfants ne vont toujours pas à l’école. Les autorités de Kinshasa comptent désormais sur une intervention militaire de la SADEC, la Communauté d’Afrique australe, pour libérer cette région de l’est du Congo. En attendant, le mandat de l’EAC a été prolongé jusqu’au début du mois de septembre.