Burkina Faso : au moins 33 militaires tués dans une attaque attribuée à des djihadistes, une ONG dénombre 136 civils tués à Karma

Selon l’armée burkinabée, les assaillants, « lourdement armés », ont visé le « détachement militaire d’Ougarou » dans l’est du pays.

Une nouvelle attaque attribuée à des djihadistes a tué, jeudi 27 avril, trente-trois soldats dans l’est du Burkina Faso. « Le détachement militaire d’Ougarou [dans l’Est] a fait face à une attaque complexe d’envergure dans la matinée de jeudi », fait savoir un communiqué de l’armée. « Trente-trois de nos soldats sont malheureusement tombés les armes à la main tandis que douze autres ont été blessés », ajoute-t-il.

« Au cours des combats, qui ont été particulièrement intenses, les militaires du détachement ont fait preuve d’une remarquable détermination face à un ennemi venu en très grand nombre », selon l’armée, qui affirme qu’ils « ont ainsi réussi à neutraliser au moins quarante terroristes avant l’arrivée des renforts ».

Le déploiement de ces renforts « a permis d’évacuer les blessés qui sont actuellement pris en charge par les services de santé », selon l’armée. Des sources sécuritaires ont affirmé que les assaillants étaient « lourdement armés » et que « certains soldats manquent à l’appel ».

Massacre de Karma

Cette attaque survient une semaine après le massacre le 20 avril d’au moins une soixantaine de civils d’un village du nord, Karma, par des hommes portant des tenues de l’armée. Révélée officiellement dimanche, elle a fait une « soixantaine » de morts, selon un procureur de la région, « plus d’une centaine », selon des représentants des rescapés et des habitants de Karma.

Une organisation de défense des droits de l’homme burkinabée a fait état de 136 morts (tous des civils). « Nos équipes ont documenté et enregistré 136 corps sans vie à Karma, dont 50 femmes et 21 enfants, parmi lesquels on a pu constater des bébés de moins de trente jours tués sur le dos de leur mère », a fait savoir le Collectif contre l’impunité et la stigmatisation des communautés (CISC) dans un communiqué parvenu vendredi 28 avril à l’Agence France-Presse.

Le gouvernement a « fermement condamné jeudi » ces actes ignobles et barbares « et a affirmé suivre de très près l’évolution de l’enquête », ouverte par le procureur du tribunal de grande instance de Ouahigouya (Nord) en vue d’« élucider » les faits et d’« interpeller toutes les personnes impliquées ».

Les victimes de Karma ont été inhumées jeudi soir. « Les autorités administratives se sont mobilisées pour l’inhumation des restes de nos mamans, de nos papas, de nos sœurs et de nos fils », soit « une centaine de personnes », a déclaré à l’Agence France-Presse (AFP) Daouda Belem, l’un des rescapés. Il a tenu à remercier le gouvernement qui a « permis à Karma d’inhumer ses morts » et appelé à collaborer avec la gendarmerie pour son enquête.

Au moins 10 000 morts en sept ans

Le 18 avril, ce sont au moins vingt-quatre personnes, dont vingt supplétifs civils de l’armée, qui avaient été tuées lors de deux attaques de djihadistes présumés dans le centre-est du Burkina. Le 15 avril, six soldats et trente-quatre supplétifs civils avaient été tués dans le nord lors de l’assaut lancé contre leur détachement.

Le Burkina Faso, théâtre de deux coups d’Etat militaires en 2022, est pris depuis 2015 dans une spirale de violences djihadistes apparues au Mali et au Niger quelques années auparavant et qui s’est étendue au-delà de leurs frontières. Les violences ont fait depuis sept ans plus de 10 000 morts – civils et militaires –, selon des ONG, et quelque 2 millions de déplacés.

Le président de transition du Burkina Faso, le capitaine Ibrahim Traoré, arrivé au pouvoir par un putsch en septembre 2022, a signé la semaine dernière un décret de « mobilisation générale » d’une durée d’un an, permettant si besoin la réquisition des « jeunes de 18 ans et plus » pour lutter contre les djihadistes.