En mars 2013, les rebelles de la Séléka déclenchaient une guerre civile en République centrafricaine. Une décennie plus tard, des fortes tensions internes et externes font craindre un nouveau transfert violent du pouvoir. Dans ce Q&A, l’experte de Crisis Group Enrica Picco décrypte la situation.
Quelle est la situation en République centrafricaine (RCA), dix ans après le coup d’Etat mené par la Séléka ?
Il y a dix ans, une coalition rebelle du nord-est à majorité musulmane, la Séléka, est descendue sur la capitale Bangui avec l’appui de milliers de mercenaires tchadiens et soudanais, sans rencontrer de résistance. La Séléka a renversé le président François Bozizé et entamé une phase de transition, mais elle n’est pas parvenue à contrôler ses troupes. Face à la brutalité des rebelles, les populations locales se sont alors organisées en milices d’autodéfense, dites anti-balaka, ciblant les communautés musulmanes. Après la démission de son président Michel Djotodia, provoquée par des pressions régionales, la Séléka s’est repliée dans le nord. Les forces internationales, déployées entretemps, se sont efforcées de sécuriser le pays afin de garantir la tenue d’élections. En mars 2016, l’investiture de Faustin-Archange Touadéra, ancien Premier ministre de Bozizé, a redonné espoir aux Centrafricains. Toutefois, malgré les nombreux accords de paix, le dernier datant de 2019, le processus de réconciliation nationale entamé pendant la transition n’a pas permis de mettre fin aux rébellions armées.
Fin 2020, Bozizé a créé une coalition hétéroclite d’ex-Séléka et d’anti-balaka, la Coalition des patriotes pour le changement (CPC), et a lancé une offensive sur Bangui. Repoussée par les forces gouvernementales (FACA) et leurs alliés russes et rwandais, la CPC s’est repliée en brousse, ainsi qu’au Tchad et Soudan voisins. Deux ans plus tard, la RCA est toujours instable. Elle semble même sur le chemin d’une nouvelle crise sécuritaire et humanitaire. Comme en 2013, les menaces qui pèsent sur le pouvoir de Bangui correspondent aux trois géographies du pays : la résurgence des groupes armés dans l’arrière-pays, la montée des tensions dans la capitale et les pressions venant de l’extérieur. Même si le président Touadéra peut compter sur les Casques bleus de la mission onusienne en RCA, la MINUSCA, ainsi que sur ses alliés bilatéraux russes et rwandais pour sécuriser son pouvoir, les évènements récents laissent à penser que la situation est susceptible de basculer rapidement, y compris dans la capitale.
Pourquoi la résurgence des attaques de la CPC est-elle alarmante ?
Depuis le début de l’année, les rebelles de la CPC ont lancé une nouvelle offensive contre les forces gouvernementales dans l’arrière-pays, en menant trois attaques d’envergure. La première a eu lieu le 21 janvier dans le nord-ouest, où les rebelles ont attaqué le poste douanier de Béloko (préfecture de la Nana-Mambéré), en détruisant les locaux administratifs et plus d’une trentaine de camions de marchandises. Béloko est le premier point de contrôle douanier en RCA du corridor commercial reliant Bangui à Douala, au Cameroun. La CPC, consciente du caractère stratégique de ce corridor pour le ravitaillement de Bangui, avait déjà tenté de le fermer en décembre 2020, dans le but d’affamer la capitale. Béloko est également la principale source de droits de douane du pays et représente un volume d’affaires que le gouvernement centrafricain et les responsables de la société de sécurité privée russe Wagner ne peuvent pas se permettre de perdre en cette période de grave crise financière.
La deuxième attaque est survenue le 25 janvier à Gordil dans le nord-est (préfecture de la Vakaga) où la CPC et les forces gouvernementales se sont affrontées pendant trois jours. Selon plusieurs sources, le bilan s’est établi à plus d’une dizaine de victimes dans les deux camps, dont sept combattants de Wagner.
Les rebelles ont mené une troisième attaque le 14 février, similaire à la précédente, contre la ville de Sikikedé (Vakaga). Ils ont fait prisonniers une vingtaine de soldats de l’armée nationale et diffusé une vidéo des otages qui a fait le tour des réseaux sociaux, ce qui a suscité une profonde indignation parmi la population. La présence accrue des rebelles dans la Vakaga est liée à la décision, prise en septembre 2022 par le ministère des Mines, d’interdire aux orpailleurs locaux de travailler dans les chantiers d’or de la Vakaga et du Bamingui-Bangoran pour permettre aux mercenaires russes d’exploiter les mines. Les rebelles, qui tiraient des profits importants de la taxation des mineurs, se sont regroupés et semblent déterminés à continuer les attaques. La course au contrôle des ressources naturelles touche également le centre du pays. Les rebelles de la CPC et les responsables de Wagner s’accusent mutuellement d’être responsables de l’attaque contre l’entreprise d’exploitation chinoise Gold Coast Group dans le village de Chingbolo (Ouaka), qui a couté la vie à neuf ressortissants chinois, le 19 mars.
Dans cette nouvelle offensive, les rebelles ont recouru à des armes et à des stratégies de combat encore jamais employées dans le pays, telles que drones artisanaux, engins explosifs improvisés (EEI) et enlèvements, qui ont pris les forces gouvernementales au dépourvu. En novembre 2022, un objet volant non identifié a largué une charge explosive contre une base des FACA et des mercenaires russes, dans l’ancienne usine de coton de Bossangoa (Ouham), à 300 kilomètres de la capitale Bangui, causant d’importants dégâts matériels. Le 21 janvier, le même type d’attaque s’est produit dans le nord-est, à Ndélé (Bamingui-Bangoran), et a provoqué la destruction d’un hélicoptère russe. Le gouvernement centrafricain a réagi quelques jours plus tard en déclarant que tous les aéronefs non identifiés seraient désormais considérés comme une menace et abattus.
” L’utilisation d’EEI et le recours aux enlèvements contribuent à isoler davantage les communautés rurales et à réduire l’accès humanitaire. “
Le recours aux engins explosifs a lui aussi augmenté depuis 2021. La CPC, en particulier, les emploie pour se barricader dans les dernières zones qu’elle contrôle. Selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies, ces engins ont tué douze personnes en 2022, dont trois Casques bleus. Au cours des deux premiers mois de l’année, ce sont sept personnes qui sont mortes suite à l’explosion de ce type d’arme. L’incident le plus grave en date a été enregistré sur l’axe Bossangoa-Bozoum où, fin février, deux soldats des FACA et un paramilitaire de Wagner ont été tués et cinq membres de leur patrouille blessés. Enfin, les enlèvements contre rançon sont de plus en plus fréquents et constituent un des nouveaux moyens de financement de la CPC. Entre novembre 2022 et mars 2023, les rebelles ont kidnappé deux agents des Nations unies et un fonctionnaire centrafricain près de Birao (Vakaga). En mars, ils ont enlevé trois mineurs chinois dans l’ouest du pays (Nana-Mambéré). L’utilisation d’EEI et le recours aux enlèvements contribuent à isoler davantage les communautés rurales et à réduire l’accès humanitaire dans un pays où 56 pour cent de la population dépend de l’aide humanitaire.
La CPC agite la menace d’une offensive imminente sur Bangui mais ne formule pas de revendications politiques claires. L’intensification des attaques dans l’arrière-pays crée non seulement des zones d’instabilité difficiles à contrôler, mais exige aussi le redéploiement des forces gouvernementales vers le nord, ce qui expose davantage la capitale. En parallèle, les rebelles disent avoir commencé à infiltrer leurs éléments à Bangui. Même s’il est difficile de confirmer cette affirmation, le gouvernement a pris ce risque au sérieux et intensifié les opérations de recherche et de fouilles autour de la capitale, menées par les FACA. Selon les données d’une organisation non gouvernementale internationale basée en RCA, au moins 35 opérations de fouilles ont eu lieu en 2022, conduisant à l’arrestation d’au moins 800 personnes. Alors qu’il refuse de négocier avec la CPC et qualifie les rebelles de « terroristes », le président Touadéra doit faire face à des mouvements sociaux qui pourraient aboutir à des troubles et à une instabilité grandissante dans la capitale, que les rebelles pourraient exploiter.
Quels sont les facteurs qui pourraient déstabiliser Bangui ?
Dans la capitale, trois facteurs endogènes fragilisent la stabilité du pouvoir central : la dérive autoritaire du gouvernement, la crise financière et les divisions au sein des forces de sécurité nationales.
Premièrement, les tentatives de révision de la constitution ont accéléré la dérive autoritaire du camp présidentiel. Depuis l’été 2022, le parti au pouvoir a lancé une série d’initiatives législatives destinées, entre autres, à effacer de la constitution la limite de deux mandats pour permettre au président Touadéra de se présenter à la présidentielle de 2025. Malgré l’annulation par la cour constitutionnelle des décrets présidentiels visant à modifier la charte fondamentale, le gouvernement n’a pas renoncé à ce projet, comme la mise à la retraite de la présidente de la cour l’a clairement démontré, et pourrait organiser un référendum sur la constitution en même temps que les élections locales en juillet prochain. A Bangui, comme parmi les membres de la diaspora à Paris, les partis de l’opposition ont fait front commun contre cette possibilité référendaire, en demandant la démission du président Touadéra et la mise en place d’un régime de transition.
Face à cette mobilisation, le camp présidentiel a réagi en prenant des mesures répressives. Les mouvements progouvernementaux, tels que le Front républicain d’Héritier Doneng et la Galaxie nationale de Didacien Kossimatchi, actifs depuis 2021, ont récemment multiplié les discours d’incitation à la haine et à la violence contre les chefs de file de l’opposition et de la société civile. En parallèle, les forces de sécurité nationales et leurs alliés russes ont intensifié les contrôles au sein de la population, en ciblant surtout les groupes suspectés de s’opposer au parti au pouvoir, à l’instar des communautés musulmanes, notamment peul. Cette approche répressive risque de convertir une partie des Centrafricains à la cause des rebelles.
” La décision des partenaires occidentaux de suspendre leur aide à cause de la présence russe dans le pays a vidé les caisses de l’Etat. “
Deuxièmement, le gouvernement pourrait bientôt se retrouver dans l’impossibilité de payer les salaires des fonctionnaires et des forces de sécurité nationales. Le budget étant financé à plus de 50 pour cent par l’appui extérieur, la décision des partenaires occidentaux de suspendre leur aide à cause de la présence russe dans le pays a vidé les caisses de l’Etat et contraint le gouvernement à suspendre tous les payements courants en décembre 2022. Les autorités ont de plus en plus eu recours à l’économie informelle pour obtenir des liquidités, ce qui a conduit à un accroissement de la corruption et à des manœuvres de détournement de fonds. En juillet 2022, le ministre de la Jeunesse a été détenu en Corée du Sud pour avoir vendu de faux diamants pour un demi-million de dollars. En même temps, la crise à l’échelle mondiale a causé une inflation galopante. A Bangui, par exemple, le prix du riz a augmenté de 33 pour cent et celui de l’huile de 25 pour cent depuis janvier 2023.
Les revendications socioéconomiques pressantes des Centrafricains, que le débat politique de plus en plus conflictuel ne permet pas d’apaiser, ont déjà mené à des manifestations violentes. Entre janvier et février 2023, les fonctionnaires du secteur public réclamant de meilleures conditions salariales ont lancé une série de grèves qui ont paralysé les secteurs de l’éducation nationale, de la santé et des télécommunications. Le 7 mars, les enseignants en grève ont attaqué certains établissements scolaires privés de la capitale et blessé plusieurs dizaines de personnes, dont des enfants. Ces grèves rappellent celles qui, entre novembre 2000 et avril 2001, avaient créé un terrain propice à la tentative de coup d’Etat contre le président de l’époque, Ange Félix Patassé. Ces frustrations pourraient conduire à des émeutes que les forces de sécurité peuvent difficilement contrôler, ce qui exposerait le pays à un dangereux cycle de manifestations et de répression.
Enfin, des nominations effectuées sur des critères ethniques au sein de la garde présidentielle font monter les tensions. Face aux rumeurs récurrentes de tentative de coup d’Etat qui ont circulé au cours des derniers mois de 2022, le président Touadéra a décidé, fin janvier, de remplacer le général Alfred Service, directeur de la garde présidentielle depuis avril 2020, par les colonels Martial Selengué et Igor Seregaza. Ces deux officiers sont issus de l’ethnie Mbaka-Mandja, la même que celle du président, contrairement aux autres officiers supérieurs qui appartiennent au groupe ethnique majoritaire en RCA, les Gbaya, qui est celui de l’ancien président Bozizé. Cette lutte de pouvoir au sein de la garde présidentielle vient s’ajouter aux frustrations grandissantes des soldats de l’armée nationale vis-à-vis des comportements souvent abusifs des mercenaires russes et aux rumeurs de suppression de la prime de déploiement dans l’arrière-pays, qui faisait déjà l’objet de détournements réguliers et a été suspendue en novembre 2022.
Quels sont les enjeux régionaux et internationaux ?
Les enjeux régionaux et internationaux restent déterminants pour la stabilité de la RCA. Comme en 2013, les relations avec le Tchad et le Soudan demeurent tendues, car ces deux pays hébergent les chefs de file de la CPC en exil et leurs bases arrière depuis 2021. A la différence de 2013, de nouveaux acteurs sont présents sur la scène sécuritaire centrafricaine. A la suite d’un refroidissement des relations avec les Occidentaux, le président Touadéra s’est tourné vers de nouveaux alliés, tels que la Russie et le Rwanda, pour satisfaire ses exigences sécuritaires. A la veille des élections de 2020, environ 2 000 paramilitaires de Wagner sont arrivés dans le pays. Kigali a également répondu à l’appel du président centrafricain en envoyant autour d’un millier de troupes sur la base d’un accord bilatéral de défense. En outre, les autorités centrafricaines et leurs alliés russes ont, par la suite, mené une campagne médiatique contre l’ancienne puissance coloniale, la France. Cette campagne a participé à la détérioration des relations avec Paris, qui a progressivement retiré ses conseillers auprès des ministères centrafricains et ses derniers soldats stationnés dans le pays.
La guerre en Ukraine a également exacerbé les inquiétudes occidentales envers les opérations de Wagner en Afrique. En janvier, les Etats-Unis ont désigné Wagner comme une organisation criminelle transnationale, ce qui expose le groupe, ainsi que ses soutiens, à des sanctions financières. A la suite de cette décision, Washington a entamé des discussions avec le président Touadéra, afin de lui offrir une solution sécuritaire alternative à Wagner et de contribuer à expulser le groupe russe du pays. Cette solution pourrait inclure, entre autres, un appui à la réforme du secteur de la sécurité, notamment en ce qui concerne la formation de l’armée, actuellement monopole des Russes. Les Etats-Unis ont mobilisé plusieurs partenaires européens et africains autour de cette initiative, notamment le Rwanda. Entretemps, des efforts régionaux ont déjà satisfait, début mars, une des préoccupations sécuritaires de Touadéra et mené au déplacement de l’ancien président Bozizé du Tchad voisin à la Guinée-Bissau.
” Si Touadéra décide de rester dans la sphère d’influence russe, il est possible que le Tchad et le Soudan décident d’appuyer les rebelles centrafricains. “
Si elle se concrétisait, l’initiative des Etats-Unis mettrait Touadéra face à un dilemme politique et sécuritaire. S’il se tourne vers les Occidentaux, la société Wagner pourra compter sur les membres du parti présidentiel mis à l’écart, ainsi que sur les officiers de la garde présidentielle ou de l’état-major récemment limogés, pour le destituer et préserver les intérêts russes dans le pays. Si Touadéra décide de rester dans la sphère d’influence russe, il est possible que le Tchad et le Soudan décident d’appuyer les rebelles centrafricains qui ont des bases arrière sur leur territoire.
N’Djamena et Khartoum, en effet, voient d’un bon œil la stratégie américaine visant à pousser la société Wagner hors de la région. Tous les deux traversent une transition politique difficile qui dépend de l’appui occidental et considèrent les mercenaires russes comme une menace à leur stabilité. Au Tchad, le président Mahamat Idriss Déby soupçonne un appui de Wagner aux mouvements armés du sud du pays et a déjà renforcé son armée le long de la frontière centrafricaine. Au Soudan, allié traditionnel de Moscou, le président Abdel Fattah al-Burhan craint que son tout-puissant vice-président Mohamed Hamdan Dagalo « Hemedti » puisse utiliser ses liens étroits avec Wagner pour le remplacer à la tête du pays.
Quelles sont les mesures à prendre pour prévenir une nouvelle crise ?
Le statu quo actuel est intenable. Comme en 2013, les risques principaux pour la stabilité du pays sont le résultat de pratiques internes d’autoritarisme, de mauvaise gouvernance et d’exclusion. Mais cette fois, le gouvernement centrafricain peut encore prendre des mesures urgentes pour remettre le pays sur les rails et éviter une nouvelle explosion de violence. Tout d’abord, les Etats-Unis et le Rwanda devraient, en contrepartie de leur offre sécuritaire, faire pression pour que le président Touadéra relance les contacts avec les chefs de file de la CPC en exil, afin de négocier un cessez-le-feu et de ramener les discussions avec les rebelles dans le cadre du processus de paix existant, dont les Nations unies et l’Union africaine sont garants. Ensuite, le président Touadéra devrait mettre en place des mesures pour agir sur les causes de la crise et limiter l’influence des enjeux régionaux et internationaux sur l’avenir de la RCA.
Premièrement, la dérive autoritaire du gouvernement centrafricain peut être corrigée. En l’absence de prises de position des pays de la région et des partenaires occidentaux face aux démarches déjà entreprises, le parti au pouvoir reste déterminé à achever la révision constitutionnelle et prépare un référendum. La priorité pour les élections présidentielles et législatives de 2025 devrait donc être de garantir la pluralité des candidatures et de veiller à ce que les candidats d’opposition qui y participent disposent des mêmes opportunités que les candidats de la majorité. Les partenaires internationaux qui apportent habituellement un appui financier et logistique aux élections en République centrafricaine, notamment les Nations unies et l’Union européenne, devraient exhorter dès maintenant le gouvernement centrafricain à apaiser les débats politiques, garantir le retour et la sécurité des opposants en exil et rouvrir l’espace démocratique, y compris en garantissant la liberté d’expression et d’association.
Deuxièmement, le gouvernement devrait prendre acte de la crise financière actuelle et accélérer les réformes de l’administration et de la gestion des finances publiques, attendues depuis longtemps. Certaines mesures de contrôle, telles que l’actuelle initiative de vérification du fichier du personnel de la fonction publique, peuvent non seulement résoudre en partie les problèmes de trésorerie pour le paiement des fonctionnaires, mais aussi poser les jalons d’une l’amélioration du système de gouvernance. Cette démarche a déjà porté ses fruits, en faisant apparaitre un effectif de 1900 fonctionnaires fictifs et en permettant à l’Etat d’épargner plus de 300 000 dollars par mois. Cette mesure devrait être suivie d’initiatives similaires dans d’autres services de l’administration publique, ainsi qu’au sein de la primature et de la présidence.
Finalement, les risques grandissants d’une révolte au sein de l’armée doivent être atténués par des réformes urgentes. En mai 2022, Crisis Group recommandait déjà aux autorités centrafricaines la mise en place d’un Conseil de défense afin d’éviter les rivalités et la dispersion de la chaîne de commandement au sein des forces de défense. Le président Touadéra devrait aussi s’abstenir d’alimenter les clivages ethniques dans le cadre des nominations à la tête de l’appareil sécuritaire, assurer des visites fréquentes de l’état-major des armées aux troupes sur le terrain pour prévenir la montée du mécontentement et fonder toute réforme de l’armée sur les disponibilités financières réelles de l’Etat.