Malgré les pressions du Fonds monétaire international et des bailleurs du Golfe, les généraux rechignent à céder des parts des entreprises qu’ils contrôlent.
Au sein du vaste empire que s’est constitué l’armée en Egypte, deux sociétés sont censées s’ouvrir aux investisseurs privés. La société Wataniya, qui opère plus de 250 stations essence, et la société d’embouteillage d’eau minérale Safi, font partie des premières privatisations que le gouvernement espère conclure. « Ils le promettent depuis des années, ils retardent et retarderont encore, nuance, sceptique, Yezid Sayigh, directeur du programme sur les relations militaro-civiles dans le monde arabe au centre Carnegie de Beyrouth. La principale raison en est la réticence des militaires à renoncer à tout ce qu’ils considèrent comme une vache à lait. Des officiers ou entités peuvent avoir un intérêt direct à conserver des entreprises, même peu rentables, pour en tirer des bénéfices, des pots-de-vin… »
L’appétit des militaires s’est aiguisé sous la présidence du maréchal Abdel Fattah Al-Sissi. Colonne vertébrale de l’Etat depuis 1952, l’armée est devenue le fer de lance de la politique de mégaprojets de l’ancien chef du renseignement militaire, porté au pouvoir par la contre-révolution égyptienne de 2013. La tradition consistant à rétribuer les officiers à la retraite avec des postes dans la haute administration, les entreprises d’Etat et les autorités locales en échange de leur loyauté a été perpétuée. L’ascendant des militaires sur les grandes orientations économiques, l’allocation des budgets et des contrats publics s’est accru. Sortant de son pré carré historique, qui va du canal de Suez aux hydrocarbures, en passant par les transports et les télécommunications, l’armée a étendu son empire.