Dans une interview qu’il a accordée à la DW, Bertrand Bisimwa, le chef du M23, est revenu sur l’origine des armes que détient son mouvement.
Les combats entre l’armée congolaise et les rebelles du M23 se poursuivent dans l’est de la République démocratique du Congo, ceci alors que plusieurs initiatives diplomatiques ont été engagées pour y mettre un terme. Un rapport des Nations unies a récemment considéré que ce groupe rebelle était en effet soutenu par le Rwanda.
Depuis qu’il a repris les armes fin 2021, le “Mouvement du 23 mars”, le M23, ne cesse de gagner du terrain dans l’est de la RDC. Cette rébellion, majoritairement tutsi, qui reproche à Kinshasa de ne pas avoir respecté des engagements pris il y a quelques années sur la démobilisation de ses combattants et le retour de réfugiés dans leurs régions d’origine, s’est emparée de vastes pans de territoire au nord et au nord-ouest de la ville de Goma. Réunis en sommet à Addis Abeba le vendredi 17 février, les dirigeants de la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Est (ECA) ont de nouveau appelé à “un cessez-le-feu immédiat” et demandé un “retrait de tous les groupes armés d’ici le 30 mars” dans l’est de la RDC. Bertrand Bisimwa le président du M23 affirme toutefois que son mouvement serait disposé à discuter avec le secrétariat exécutif de l’EAC, des conditions d’un retrait.
La provenance des armes
Depuis le retour en force du M23, la RDC accuse son voisin, le Rwanda, de soutenir cette rébellion. Bien que Kigali rejette ces accusations, l’Onu et plusieurs pays occidentaux n’ont pas hésité à désigner la responsabilité du Rwanda.
“Lorsque nous nous battons avec le gouvernement congolais, nous prenons des risques pour lui prendre des armes (…). Nous sommes dans une région où circulent les armes, il suffit d’avoir 10 dollars, 100 dollars pour s’acheter une arme (…). Et vous savez que nous n’avons pas autant d’armes que les FARDC, que la Monusco. Nous n’avons pas de chars de combat, nous n’avons pas d’hélicoptère, nous n’avons pas de blindés…” c’est la réponse de Bertrand Bisimwa, le chef du M23 lorsqu’on l’interroge sur l’origine des armes et les soutiens dont bénéficie le M23.
Une version qui ne convainc pas Jason Stearns du Groupe d’étude sur le Congo. Il rappelle que le soutien militaire dont dispose le M23 n’est plus depuis longtemps un secret.
“Il est maintenant assez bien établi que le M23 reçoit du soutien du Rwanda, cela a été documenté par différents rapports du groupe d’experts sur le Congo et confirmé par les services de différents gouvernements. La nature de ce soutien est bien sûr en armements et équipements mais il y a aussi un soutien en hommes, il y a des troupes rwandaises qui traversent la frontière en soutien au M23. C’est normal qu’il nie cela mais les faits sont établis”, explique-t-il à la DW.
Des exactions
Sur le terrain, outre les combats contre l’armée congolaise, le M23 est accusé de s’en prendre aux populations civiles.
Un rapport récent d’Amnesty International a indiqué que des dizaines de femmes ont ainsi été violées par les combattants du mouvement dans une série d’attaques commises entre le 21 et le 30 novembre dernier, à Kishishe et Bambo, deux villages du territoire de Rutshuru, dans le Nord-Kivu.L’organisation parle également d’exécutions sommaires.
Sur la base de nombreux témoignages, Amnesty International a dénoncé ce qu’elle qualifie de “crimes de guerre” qui pourraient également constituer des “crimes contre l’humanité”. Interpellé sur ces violences, Bertrand Bisimwa remet en cause la crédibilité des différents rapports ciblant son groupe et renvoit aux leaders communautaires qui seraient selon lui, mieux placés que des experts “assis dans des bureaux climatisés” et qui n’auraient jamais mis les pieds dans la région.