En Éthiopie, le gouvernement fédéral a appelé les régions à la rescousse, face à la poussée des forces tigréennes qui le combattent. Les civils oromos, amharas et afars ont été appelés ces derniers jours à défendre l’Éthiopie les armes à la main. Cette mobilisation selon l’appartenance ethnique fait craindre un tournant encore plus violent de la guerre et, selon des observateurs, révèle aussi que les forces fédérales ne sont plus en mesure de combattre seules.
L’armée éthiopienne est désormais « hors de combat ». C’est du moins l’avis de Matt Bryden, directeur de Sahan Research et ancien enquêteur de l’ONU, qui ajoute que la situation actuelle du gouvernement fédéral est « plutôt désespérée ». Pour lui, la rébellion tigréenne a profité à la fois du mauvais commandement des forces fédérales « purgées de ses officiers tigréens avant le début de la guerre », mais aussi des équipements tombés entre ses mains lors de sa poussée sur Mekele.
Même constat du côté de William Davison, de l’International Crisis Group. Pour lui, la mobilisation générale des Oromos, des Amharas et des Afars s’explique par « la nécessité militaire » et « l’urgence de l’unité » de l’Éthiopie face à ses pertes. « Le dernier avantage qu’Addis-Abeba peut opposer, c’est le nombre de soldats potentiellement recrutés », explique-t-il « mais il est à craindre que cela ne résulte que dans davantage de morts et une polarisation ethnique accrue », conclut-il.
Militairement, le but pour le gouvernement est maintenant de protéger l’autoroute stratégique Djibouti-Addis, disent les deux analystes. Sa capture par les Tigréens « changerait tout », selon Matt Bryden. Mais pour William Davison, on voit mal comment des miliciens « moins formés et moins armés » pourraient retourner la situation en faveur d’Abiy Ahmed, après que les forces tigréennes ont résisté à l’effort combiné de l’Éthiopie et de l’Érythrée pour les défaire.