Depuis début juillet, 70 avions-cargos ont atterri dans les aéroports de l’est libyen et une trentaine dans l’ouest.
L’émissaire par intérim de l’ONU en Libye, Stephanie Williams, a déploré, mercredi 2 septembre, devant le Conseil de sécurité la poursuite de violations de l’embargo sur les armes imposé en 2011 à ce pays, alors qu’un récent rapport onusien incrimine à nouveau la société militaire privée russe Wagner.
Depuis la dernière présentation de la situation le 8 juillet, « environ 70 avions ont atterri dans les aéroports de l’est en soutien » à l’armée du maréchal Khalifa Haftar, « pendant qu’une trentaine d’appareils ont été envoyés dans des aéroports de l’ouest de la Libye » en appui au gouvernement d’union GNA, a-t-elle déclaré. « Neuf cargos se sont amarrés dans des ports de l’ouest en soutien au GNA pendant que trois navires sont venus bénéficier » aux forces pro-Haftar, a ajouté la responsable, sans donner d’indications sur le contenu des cargaisons.
« Les soutiens étrangers renforcent leurs capacités dans les principales bases aériennes libyennes à l’est et à l’ouest », a résumé Stephanie Williams, en dénonçant une atteinte à la souveraineté de la Libye et « une violation flagrante » de l’embargo de l’ONU sur les armes. La mission de l’ONU en Libye, dont le mandat doit être renouvelé à la mi-septembre, « continue de recevoir des informations sur une présence à grande échelle de mercenaires et d’agents étrangers, ce qui complique (…) les chances d’un règlement futur » du conflit, a-t-elle précisé.
Le GNA, reconnu par l’ONU, est soutenu par la Turquie tandis que le camp Haftar est appuyé par les Emirats arabes unis, la Russie et l’Egypte. Dans un récent rapport intermédiaire des experts de l’ONU chargés du contrôle de l’embargo, le groupe russe Wagner est à nouveau dénoncé comme violant l’embargo sur les armes. « Les activités de mercenaires continuent et, dans le cas du groupe Wagner, augmentent », indique ce document, selon un diplomate s’exprimant sous couvert d’anonymat.
« Totalement inefficace »
Les forces rivales de Haftar et du GNA « reçoivent un soutien de plus en plus important d’acteurs étatiques et non étatiques, ce qui augmente le risque de transition vers un conflit armé international », souligne le préambule du rapport auquel l’AFP a eu accès. « L’embargo sur les armes reste totalement inefficace. Dans le cas des Etats membres soutenant directement les parties au conflit, les violations sont étendues, flagrantes et sans aucun égard pour d’éventuelles sanctions », insiste le document.
Le rapport confirme différentes violations de l’embargo sur les armes commises par « les Emirats, la Turquie, la Jordanie, l’Egypte, la Syrie et la Russie », a-t-on ajouté de source diplomatique.
Lors de la session publique du Conseil de sécurité, l’ambassadeur russe à l’ONU, Vassily Nebenzia, a rejeté les accusations d’interférences russes. « Il n’y a pas un seul Russe en uniforme en Libye », a-t-il assuré. Son homologue américaine, Kelly Craft, a au contraire évoqué la présence de mercenaires russes liés au gouvernement russe. « Il n’y a pas lieu d’avoir des mercenaires étrangers en Libye, dont le groupe Wagner affilié au ministère russe de la défense qui combat aux côtés des forces pro-Haftar », a-t-elle dit.
L’ambassadeur français, Nicolas de Rivière, a appelé à un renforcement de la mission de l’ONU à l’occasion de son renouvellement afin qu’elle puisse accompagner un possible cessez-le-feu et faire mieux respecter l’embargo sur les armes. Plusieurs membres du Conseil ont réclamé la nomination au plus vite d’un émissaire de l’ONU. En raison de divergences entre les Etats-Unis et leurs partenaires sur la définition du poste, aucun successeur n’a encore été nommé à Ghassan Salamé, démissionnaire en mars pour raisons de santé.
La Libye est en proie au chaos depuis la chute de Mouammar Kadhafi en 2011.