Les violences qui opposent civils et policiers dans le centre du Bénin ont fait au moins deux morts parmi la population, et trente blessés au sein des forces de l’ordre. Les affrontements ont débuté mardi dans la région, sur fond de rivalité entre l’actuel président Patrice Talon et son prédecesseur Thomas Boni Yayi.
Au moins deux personnes ont été tuées samedi à Savè, dans le centre du Bénin, alors que les forces de sécurité tentaient de déloger les opposants, et on craint que les violences aient fait d’autres victimes à Tchaourou, commune d’origine de l’ancien chef de l’Etat Boni Yayi, un peu plus au nord.
Les violences ont éclaté dès mardi à Tchaourou après l’arrestation de deux personnes, accusées de violences électorales lors des législatives du 28 avril dernier.
Les populations, qui se sont soulevées contre ce qu’elles qualifiaient « d’arrestations arbitraires », ont bloqué la route nationale.
Après des jours d’affrontements entre opposants armés (appelés « chasseurs ») et forces de l’ordre, le ministre de l’Intérieur, Sacca Lafia a annoncé vendredi qu’une trentaine de policiers avaient été blessés par des tirs de fusils artisanaux ou à l’arme blanche, sans donner de bilan du côté des civils.
« Panique totale »
Les rares habitants de Tchaourou, qui n’ont pas fui vers les campagnes, ont fait état de « plusieurs morts par balles » et de blessés graves, sans pouvoir donner de bilan précis.
Les violences se sont ensuite propagées jeudi à Savè, à une centaine de kilomètres plus au sud, lorsque les populations ont voulu empêcher le passage d’un contingent de la police allant en direction de Tchaourou.
La journée de vendredi a été très tendue et « il y a eu à nouveau des échanges de tirs entre policiers et des individus masqués samedi matin », a affirmé le maire de Savè, Timothée Biaou. « Sept civils ont été reçus à l’hôpital et il y a aussi eu deux morts ».
« Samedi matin, il y a eu deux morts: le premier vers 10 heures, c’était un taxi-moto, et le deuxième c’était un adolescent, qui était allé faire une course », a expliqué un témoin de la scène.
« La route a été débloquée, mais c’est la panique totale. Beaucoup de gens ont fui, les autres restent chez eux », a ajouté ce témoin sous couvert de l’anonymat.
Fétiches vaudous
Dans cette commune moyenne du centre du Bénin, les rues étaient désertes, le marché vide, boutiques et commerces fermés. La route a finalement été rouverte en fin de journée, samedi, mais les accès restaient « minés de fétiches vaudous ».
Le calme restait très précaire et peu avant midi, le dispositif militaire dans la ville a été renforcé par une dizaine de véhicules blindés de l’armée, trois chars et des dizaines d’hommes armés.
« Assassinat politique »
Ces affrontements interviennent alors que le bras de fer fait rage entre l’actuel président Patrice Talon et son prédécesseur, Thomas Boni Yayi.
À Cotonou, le domicile de l’ancien président Boni Yayi reste encerclé par les forces de l’ordre depuis les manifestations post-électorales des 1er et 2 mai. L’ex-chef de l’État est toujours « séquestré » dans sa résidence, ont dénoncé samedi ses avocats lors d’une conférence de presse.
« Nous assistons aujourd’hui à un plan pensé, conçu et qui est en train d’être mis à exécution et qui vise l’assassinat politique de Yayi », a déclaré Me Renaud Agbodjo, qui affirme que son client craint pour sa sécurité. Une « stratégie de victimisation », selon la présidence.