Belhassen Trabelsi, homme d’affaires et beau-frère de l’ex-président tunisien Zine el Abidine Ben Ali, a été mis en examen et incarcéré lundi à Marseille, après trois ans de cavale depuis sa fuite du Canada en 2016, où il était menacé d’extradition.
Déclaré « introuvable » par la justice canadienne en juin 2016, le frère de l’ex-première dame tunisienne a été arrêté la semaine dernière dans le sud de la France, dans des circonstances encore inconnues. Lundi 18 mars, il a été mis en examen, pour « faux aggravé et blanchiment en bande organisé », et placé en détention provisoire, à la prison marseillaise des Baumettes, a précisé le procureur de la République de Marseille.
Belhassen Trabelsi a été interpellé dans le cadre d’une enquête menée par la juridiction inter-régionale spécialisée (Jirs) de Marseille, selon une source proche de l’enquête en France. Mais les faits en question n’ont pas été spécifiés, pas plus que la période à laquelle ils auraient été commis.
Demande d’extradition
Homme d’affaires incontournable sous le régime Ben Ali, et poursuivi par la justice tunisienne dans plusieurs affaires de corruption, Belhassen Trabelsi fait l’objet de « 17 mandats de recherche en Tunisie et de 43 mandats d’amener internationaux », avait précisé dimanche le ministère tunisien de la Justice. Tunis a demandé son extradition dès vendredi aux autorités françaises.
Qualifié de « quasi-mafieux » par une dépêche diplomatique américaine de 2008, Belhassen Trabelsi avait trouvé refuge au Canada quelques heures à peine avant la chute de Ben Ali, le 14 janvier 2011, après avoir fui avec sa famille à bord de son yacht. Le bateau avait ensuite été saisi par les autorités canadiennes.
Pas d’asile politique au Canada
En mai 2012, après avoir perdu son statut de résident permanent au Canada, il avait demandé l’asile politique, disant craindre pour sa vie en Tunisie, ce qui avait repoussé toute possibilité d’extradition. Mais il avait été débouté à deux reprises de cette demande, en janvier 2015 et le 14 avril 2016. Il se trouvait sur le point d’être expulsé lorsque Ottawa avait définitivement perdu sa trace, début juin 2016.
« Il a disparu dans la nature. J’espère que les Canadiens vont le retrouver le plus tôt possible pour être livré à la justice tunisienne », avait alors commenté le numéro 2 de l’ambassade de Tunisie à Ottawa, Borhene El Kamel, après le départ du richissime homme d’affaires, aujourd’hui âgé de 56 ans, de son appartement cossu de Montréal.
« Corruption de grande ampleur »
La Tunisie avait demandé l’extradition de Belhassen Trabelsi à Ottawa, le considérant comme l’un des principaux responsables d’importants détournements de fonds publics sous le régime Ben Ali. Lors de séances devant la Commission de l’immigration canadienne, entre mai 2013 et septembre 2014, où il se présentait lui-même comme « un citoyen tunisien lambda », la justice canadienne avait exposé les allégations de « crimes graves de droit commun » dont il faisait l’objet : manipulation boursière, détournement de fonds, extorsion et corruption.
« Il est réputé pour avoir été impliqué dans une corruption de grande ampleur, du remaniement de la Banque de Tunisie à l’expropriation de biens et l’extorsion de pots-de-vin », selon un câble diplomatique de juin 2008 de l’ambassade des États-Unis à Tunis, que Wikileaks avait publié trois ans plus tard. Des documents judiciaires l’accusent également de « trafic de pièces archéologiques » et d’avoir quitté la Tunisie avec des statuettes antiques.