Convoqué à la barre comme témoin dans le procès du putsch manqué de 2015, l’ex-président du Conseil national de transition a fait de nouvelles révélations sur l’affaire des écoutes. Selon lui, Guillaume Soro a admis, lors d’une conversation qu’ils ont eue à Paris un mois après la tentative de coup d’État, avoir bien tenu les propos qui lui sont reprochés.
L’affaire des écoutes n’en finit pas de faire couler de l’encre au Burkina Faso et en Côte d’Ivoire. Plus de trois ans après la tentative de coup d’État du général Gilbert Diendéré à Ouagadougou, défenseurs et accusateurs de Djibrill Bassolé et de Guillaume Soro continuent à s’écharper sur la véracité de ces enregistrements téléphoniques, où l’on entend l’ex-ministre burkinabè des Affaires étrangères et l’ex-président de l’Assemblée nationale ivoirienne évoquer un plan de soutien aux putschistes.
Convoqué mercredi 13 mars comme témoin dans le procès du putsch manqué, Chérif Sy a apporté une nouvelle pierre à l’édifice. Devant le tribunal militaire, l’ex-président du Conseil national de transition (CNT), qui était entré en clandestinité dès le 16 septembre 2015 pour échapper aux putschistes de l’ex-régiment de sécurité présidentielle (RSP), a livré un témoignage accablant contre Guillaume Soro – et, par ricochet, contre Djibrill Bassolé.
Aparté à Paris
À la barre, l’actuel ministre burkinabè de la Défense a assuré avoir brièvement rencontré Guillaume Soro en octobre 2015, soit un mois après les faits, lors d’une conférence de parlementaires francophones à Paris. Selon lui, Soro serait venu le voir en aparté dans un couloir. « Il m’a dit qu’il voulait discuter des propos qu’il avait tenus contre moi dans les échanges téléphoniques avec Djibrill Bassolé », a assuré Chérif Sy, qui s’est étonné que certains puissent encore douter de l’authenticité des écoutes à partir du moment où Soro a lui-même « reconnu ce qu’il a dit ». « Je lui ai répondu que je serais heureux de le recevoir au Burkina Faso s’il voulait parler de ça », a-t-il conclu.
Dans une des conversations téléphoniques, la voix de Guillaume Soro recommandait, outre un soutien opérationnel et financier aux putschistes du RSP, les assassinats de Chérif Sy et de Salif Diallo, l’ancien président de l’Assemblée nationale burkinabè décédé en 2017. « Nous démentons formellement la véracité de ces enregistrements. Pour le reste, nous laissons Chérif Sy à ses délires. Il est instable psychologiquement. Guillaume Soro ne l’a jamais vu à Paris », se défend Moussa Touré, le chargé de communication de l’ancien numéro deux de l’État ivoirien.
Fin avril 2016, la justice burkinabè avait annulé le mandat d’arrêt international qu’elle avait émis quatre mois plus tôt à l’encontre de Guillaume Soro pour « vice de forme ». Elle avait ensuite demandé à la justice ivoirienne de le poursuivre dans le cadre d’une autre procédure dite de « dénonciation ». Une requête restée jusqu’à présent lettre morte à Abidjan.